Four Ways to Rock :: 1997 / 1999 :: acheter cet album

Sur Vertex, Buck 65 proposait une longue série de beats bizarres, surréalistes et expérimentaux, mais jamais pédants. L’album était fait tout entier d’un hip-hop vaporeux et atmosphérique, seulement troublé par quelques scratches longs et étirés. Et pour brouiller les pistes plus encore, le beatmaker s’ingéniait à découper la plupart de ses titres en mouvements, deux, parfois plus, dont au moins un instrumental. Le Canadien n’hésitait pas non plus à embarquer son hip-hop vers les contrées peu familières de la musique contemporaine, samplant sans vergogne La Messe Pour Le Temps Présent de Pierre Henry (il s'en voudrait plus tard d'avoir cédé à cette facilité), proposant par ailleurs une version du "In Every Dream House There is a Heartache" de Roxy Music, encore plus insolite que l’originale.

La voix de Buck 65, elle, était calme, posée, parlée plus que rappée, et très compréhensible aux oreilles françaises. Elle déclamait des paroles capables de passer d'une poésie onirique au bon mot humoristique ("ces idiots de DJs donneraient leur bras droit pour devenir ambidextres") ou de célébrer les vertus du base-ball, un sport que notre homme avait pratiqué à haut-niveau. Quelques titres se distinguaient, comme le single "The Centaur" (un homme au sexe énorme convoité par l’industrie du porno y symbolisait l’état du hip-hop), l'orgue drôle de "The Blues Part I", le majestueux "Bachelor of Science", et surtout la gemme "Sleep Apnoea", bâtie autour d'un piano et close par un rideau de scratches.

Bénéficiant de la hype Anticon, Vertex permettait à Buck 65 d'élargir un public jusqu'ici exclusivement canadien, et de devenir l'une des figures phares d'un rap indépendant dont, au cours des années 2000, il épouserait toutes les mutations, donnant dans un rap intimiste, se reconvertissant dans le folk rock et dans une pop gainsbourgienne, ou flirtant avec la musique électronique, cumulant sorties grand public et obscurs enregistrements underground, toujours avec succès.