Meek Mill, de son vrai nom Robert Williams, s'est manifesté bien avant de sortir son premier album. Ses premières traces remontent à 2006 et, rapidement, il a su attirer l'attention des majors. Mais comme souvent dans l'univers du rap, des déboires judiciaires sont survenus, qui ont entravé sa carrière. Ce n'est donc qu'au début des années 2010, une fois affilié au Maybach Music de Rick Ross, que le rappeur de Philadelphie sort enfin un album officiel, Dreams & Nightmares, avec les invités de circonstance, les vieilles gloires Nas et Mary J. Blige, et le plus récent Drake, tous chargés de l'introniser et de le faire entrer dans la cour des grands.

MEEK MILL - Dreams & Nightmares

Pour qui compare cet album aux mixtapes qui ont fait monter le buzz, les deux Dreamchaser, le diagnostic est sans surprise : en format officiel, le rappeur perd en aspérité ce qu'il gagne en professionnalisme. La faute, cependant, n'en revient pas uniquement aux titres sirupeux pleins de R&B frelaté, ce passage obligé pour tout rappeur assoiffé de succès. Car si "Maybach Curtains", avec Nas et Rick Ross, force la dose avec son saxophone complaisant et le chant de John Legend, si "Lay Up" est assez moche, d'autres titres dans ce registre s'en tirent remarquablement bien, comme "Who Your Around", avec Mary J. Blige, ou bien "Traumatized", quand Meek Mill s'adresse à cœur ouvert au type qui a pourri sa vie en assassinant son père.

L'album recèle quelques bangers qui décuplent l'impact que Meek Mill avait sur les Dreamchaser, et ce d'emblée, avec ce "In God We Trust" gothique, pompeux et possédé, soutenu par un orgue minimaliste et sépulcral, et nommé d'après la devise qui figure sur le dieu Dollar, puis en toute fin, avec un "Real N***** Come First" tout aussi imposant. Mais "Young Kings", au contraire, se montre anodin, et "Believe It", avec Rick Ross, est une célébration de l'argent routinière dans le plus pur style Maybach Music. Quant à ce "Young & Gettin' It", où Meek Mill s'essaie maladroitement à l'Auto-Tune, il est tout bonnement infâme.

Il y a donc à boire et à manger sur cet album, autant avec les titres qui cognent qu'avec ceux qui caressent. Les meilleurs moments, en fait, se trouvent souvent entre ces deux extrêmes. C'est le cas de la collaboration avec Drake, un "Amen" plus profane que son titre ne le laisse croire, qui était déjà un des grands temps forts de Dreamchaser 2. C'est le cas aussi de "Polo & Shell Tops", sur un piano, qui nous parle des amitiés difficiles et ambigues en milieu délinquant. Ce sont ces quelques titres qui font pencher la balance du bon côté, et de Dreams & Nightmares l'exemple même d'un album à vocation "commerciale" globalement satisfaisant.

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