Les Adolescents auraient trouvé leur nom par hasard, en le chipant à un groupe de filles. Cependant, celui-ci est particulièrement pertinent. Apparus sur la scène punk hardcore du Comté d'Orange, issus de ou liés à Agent Orange et Social Distortion, ses membres n'avaient encore que dix-huit ans quand est sorti ce premier album produit par Mike Patton (non, pas celui auquel vous pensez, un autre), et ils ont trouvé dans la musique une réponse à leur statut de parias au lycée, et à leur manque de succès auprès des filles. En conséquence, leurs titres expriment le mal-être, la bile et la hargne revancharde qui caractérisent ce moment de la vie.
Leurs chansons sont acerbes, énergiques, et bien sûr très courtes. Et dans les paroles, se concentrent les désillusions propres à cet âge ingrat. Elles expriment la morgue, le dégoût, le désenchantement et le sentiment d'être incompris ("Who's Who", "Amoeba"). On y entend de la haine envers tout le monde ("Creatures"), notamment ces enfants qu'ils étaient il n'y a pas si longtemps ("I Hate Children"). On y découvre de la rancœur envers ces jolies filles qui ne les aiment pas ("L.A. Girl"), une frustration sexuelle qui trouve son exutoire dans la violence ("Wrecking Crew") et la tentation du suicide ("Self Destruct"). On y trouve du nihilisme, des relents d'anarchisme et de la défiance envers la démocratie ("Democracy"). Il y a aussi de l'esprit de corps, des appels à cesser la violence entre punks ("Rip It Up") et à rejeter les opportunistes qui les ont rejoints la veille ("No Friends").
Néanmoins, ces adolescents que sont encore les Adolescents profitent des musiciens plus expérimentés que sont le batteur Casey Royer et le guitariste Rikk Agnew. Ceux-ci tirent vers le haut le groupe fondé par le bassiste Steve Soto et par le chanteur Tony Brandenburg. Aux démos de ces derniers, ils ajoutent des morceaux de leur ancienne formation, les Detours, et pas des moindres. Imparables, "No Way" et plus encore "Amoeba", sont les hymnes des Adolescents, ils sont leurs tubes. Et le fantastique "Kids Of The Black Hole" est leur morceau de bravoure. Il est le plus long et le plus épique de l'album, celui qui, racontant les nuits de perdition dans l'appartement de Mike Ness de Social Distortion, dépeint parfaitement la jeunesse désœuvrée de l'ère punk.
Peu après la sortie de Adolescents, et malgré son relatif succès (les Dead Kennedys viennent alors d'ouvrir les portes pour la scène californienne), le groupe se dissout. Pour la première, mais pas la dernière fois. Il y aura des reformations et d'autres opus, à mesure que la réputation du groupe grandira, tout comme l'aura de cet "album bleu". Traduction parfaite du malaise adolescent, contenant en germe les évolutions à venir de leur scène (l'influence metal sur les parties lentes de "L.A. Girl", l'arrivée décisive de Rikk Agnew chez Christian Death...), il deviendra un classique des premières heures du punk hardcore, et il influencera la génération des années 90, celle qui en fera un genre tout public.
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