Ivan Ramirez est un proche des $uicideboy$. Il appartient à la même école. Il est de ceux qui, à l'âge du Soundcloud rap et de l'après trap music, perpétuent le son du Memphis des années 90, de ceux qui se le réapproprient avec un filtre particulièrement macabre et dépressif. Le jeune homme d'origines mexicaine et nicaraguayenne est même le premier à avoir rejoint le label du duo de La Nouvelle Orléans, Grey 59 (ou G*59). Bien qu'il ait été alors plus connu qu'eux, il s'est durablement lié à $crim et Ruby da Cherry. Toutefois, son style de rap à lui témoigne d'influences différentes.

RAMIREZ - The Tragedy of a Clown

Ramirez l'a démontré en 2020 avec sa sortie de référence, un Playa$ Manual qui révélait une posture et des sonorités issues du g-funk californien. Le rappeur, en effet, provient de la Côte Ouest, de San Francisco plus précisément. Et ses premières influences, naturellement, ont été des gens de là-bas. Ses idoles ont été Andre Nickatina et Cellski, avant qu'il ne se tourne vers des Sudistes tels que Three 6 Mafia et DJ Screw. Et cela s'entend encore sur sa dernière "mixtape", un Tragedy of a Clown concluant, malgré sa petite demi-heure.

Le thème est celui du clown triste, celui de l'artiste obligé de faire rire et de paraître joyeux, alors que son esprit se noie dans le pessimisme et la dépression. Une fois passées les vantardises et l'agressivité habituelles, celles par exemple du très bon single "Carhartt Vest", Ramirez parle de ses démons. Il se décrit comme un accroc zombi sur "Six Feet Under". Il cherche la lumière au milieu de sa déprime sur le chantonné "The Root of Demise", avant d'embrayer sur les envies de meurtre et l'imagerie horrorcore des macabres "Murdered out Vehicles", "The Gallows Wait" et "Shameless Gorillas".

Nous sommes bien dans la lignée des $uicideboy$. Leurs compagnons de label sont là pour le rappeler, comme Shakewell, et Germ sur le très bon "Carhartt Vest", ainsi que ces artistes de même tendance que sont les anciens Buffet Boys Pouya, Fat Nick et le producteur Mikey the Magician, tous issus de cette ville, Miami, où réside désormais Ramirez.

Cependant, même si le tropisme West Coast est moins marqué que sur Tha Playa$ Manual, le rappeur rappelle parfois ses racines californiennes. Il y a par exemple l'instru lente, souple et relax de son "Intro". Il y a aussi, sur "Return of the Corpse", un sample d'Ice Cube issu de Boyz n the Hood. Et puis surtout on découvre ici "The Dungeon", un morceau très réussi qui, autant par sa musique que par ses paroles de psychopathe, sonne comme du Cypress Hill.

Comme quoi, même si l'on est toujours fidèle au nom du label, même si on utilise toujours la même couleur sinistre chez Grey 59, ce gris-là peut révéler beaucoup de nuances.

Acheter cet album