En 2018, alors qu'il était un parfait inconnu, Baby Smoove avait sorti un album nommé Why So Serious. Jugeant alors qu'il n'avait alors pas reçu l'attention méritée, estimant justement qu'il n'avait pas été assez pris au sérieux, il avait enchaîné avec un autre projet intitulé cette fois I'm Still Serious. L'année suivante, toujours très prolifique comme la plupart de ses compères de Detroit, il avait délivré entre autres l'excellent Flawless, ainsi que Mr. Perfect, pour signaler au monde sa perfection. Cependant, considérant une fois encore ne pas récolter assez d'éloges en dépit de sa notoriété croissante, il a enfoncé le clou en appelant l'une de ses sorties les plus récentes Im Still Perfect. Baby Smoove, qu'on se le dise, veut qu'on l'apprécie à sa juste valeur.

BABY SMOOVE - Im Still Perfect

Et on doit lui donner raison. En effet, il y a peu à jeter sur ses albums, en particulier celui-ci, son meilleur en 2020. Certes, il ne change rien à sa formule. Apathiques, récités sur le mode du jean-foutre, marmonnés dans sa barbe, terminés par des murmures parfois inintelligibles, ses propos défilent comme s'il se fichait de leur portée et qu'il était pressé d'en finir. Quand il pleure la mort de sa sœur sur "Losing My Mind Pt. 2", quand il est malheureux et solitaire sur "Lonewolf", Baby Smoove paraît désabusé, et c'est normal. Mais quand il se lance dans des attaques au vitriol, quand il se montre menaçant comme sur "The New Smoove" et "Losing My Mind Pt. 2", quand il fait part de ses ambitions de succès sur "Sleep Walking", avec Veeze, ou quand il se vante de ses vêtements de marque sur "Palm Angels", Baby Smoove est toujours aussi mou. Et curieusement, ce contraste fonctionne, tout comme celui qui s'affiche avec sa musique quand elle sort de la léthargie et qu'elle retrouve la vigueur du son de Detroit.

Baby Smoove fait de la richesse une routine, de la délinquance une action mécanique et désinvolte. Est-il assommé par les drogues ? A-t-il atteint un tel niveau dans son métier de dealer qu'il n'a plus de motivation ? A-t-il tant de facilités qu'il n'en retire plus aucune satisfaction ? A-t-il perdu goût à la vie, comme quand sur "Losing My Mind Pt. 2", il prétend en avoir assez des filles et privilégier les rapports expéditifs ("je ne suis ici que pour ta bouche, pas la peine d'allonger tes jambes", dit-il sans conviction à sa compagne) ? Est-il au bout du désespoir qu'il évoque sur "You & Me", une histoire d'amour brisé ? Est-ce tout cela à la fois ? Difficile de juger. Et pourtant, cela continue à faire son effet sur quelques temps forts comme "Losing My Mind Pt. 2", le mélodique et chantonné "Drank-Juice", ou les presque relevés "Settle Down, Pt.2" et "Oh My God". Alors ? Encore parfait, Baby Smoove ? Peut-être pas, mais pas loin.

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