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SHEFF G - The Unluccy Luccy Kid

Albums rap

SHEFF G - The Unluccy Luccy Kid

Perçu à l'origine comme un sous-genre de la trap music d'Atlanta, la drill de Chicago n'a cessé, à son tour, d'engendrer des rejetons, en Amérique comme ailleurs. L'ailleurs, c'est la France, où la version locale de la trap lui doit en vérité beaucoup, même si elle ne porte pas son nom. Mais c'est aussi, et même surtout, la Grande-Bretagne, où depuis un moment déjà, sévit un très influent mouvement UK drill.

SHEFF G - The Unluccy Luccy Kid

Et aux Etats-Unis, c'est rien de moins que Brooklyn. Cette version new-yorkaise de la drill music, qui ressemble plus souvent à sa cousine anglaise qu'à sa mère chicagoane, Sheff G a été l'un des premiers à la faire connaître, en 2017, avec le titre "No Suburban", une réponse au "Suburban” de 22gz, un rappeur des Blixky Boys, le gang rival au sien, M8V3N.

En 2019, si la drill de Brooklyn est sortie de la confidence, c'est surtout grâce à un autre, Pop Smoke, et à son titre "Welcome To The Party". Mais immédiatement après, Sheff G est revenu sur le devant de la scène avec The Unluccy Luccy Kid, un album où il est secondé par son compère Sleepy Hallow, et où se trouve également le Californien Mozzy. Et cette sortie a, elle aussi, des arguments de poids.

On y perçoit le passif violent et la vie agitée du rappeur. Le désespoir et le nihilisme qui sous-tendent la drill, c'est ce en quoi Sheff G s'est reconnu le jour où il a découvert Chief Keef. Et ils se manifestent à tout moment, quand le rappeur parle de délinquance juvénile sur "We Getting Money", ou quand, sur "Breesh" et "All My Life", il raconte la chasse à l'argent et les luttes quotidiennes qui gouvernent sa vie.

Toutefois, musicalement parlant, la nervosité et la brutalité de la drill originelle sont rares sur The Unluccy Luccy Kid. Elles cèdent leur place à cette posture triste et résignée qui domine l'ensemble du gangsta rap actuel. Conçues de main de maître par Great John, qui prend en charge le gros de la production, ce sont des touches de piano pathétiques qui soutiennent les propos, sur des "8th Block", "Feel a Way", "Respect", "Think I'm Playing" et "Menace" dépouillés, simplement enrobés des quelques percussions de circonstance.

Ce sont aussi des sons synthétiques atmosphériques sur "Designer", ou au contraire un curieux assemblage de xylophone sur le surprenant "All My Life". C'est une guitare triste qui assiste le noir "Flows", conçu cette fois avec Yondo, un titre qui avait été un freestyle avant de devenir le temps fort de l'album. Ce sont des chants évaporés qui accompagnent la seconde partie du même "Flows", ce "Tonight" produit quant à lui par Deltah Beats, ce "We Getting Money" conçu avec Ayy Walker, et le conclusif "Emotionless".

Ce que propose Sheff G, c'est une autre version de la Brooklyn drill que celle popularisée par Pop Smoke, nous démontrant ainsi que cette nouvelle déclinaison de la drill ne se résumera ni à une seule personne, ni à une seule formule.

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