Baton Rouge est l'une des scènes les plus vivaces des Etats-Unis. Elle nous a donné l'un des rappeurs les plus influents de l'histoire, Boosie Badazz, ainsi que les têtes d'affiche Kevin Gates et YoungBoy NBA, mais aussi Webbie, Foxx, Mouse On Tha Track, Mista Cain, DJ B-Real, Max Minelli. Et si on creuse toujours plus, il y a Spitta, T.E.C., Maine Musik, Scotty Corleone, Que Almighty, Jungle Muzik Larry, 70th Street Carlos, WNC Whop Beezy, Sherwood Marty, Eatem, Percy Keith... et j'en passe. Et tout cela n'est pas que du name dropping. Tous ces gens ont sorti de grandes choses, de même que Traymond Jones, alias Bubba.
Bubba. Pas notre Booba national, non. Et pas Bubba Sparxxx non plus. Juste Bubba, un rappeur encore plus méconnu que les autres, qui a pourtant plusieurs années de sorties remarquables derrière lui, depuis Perfect Timing en 2014. A celles-ci, s'est ajouté l'an dernier Long Live Big Meats World, un album distribué gratuitement sur DatPiff.
Dédié à son père décédé (on entend la voix de ce dernier en intro, qui est le "Big Meats" en question, et il lui est rendu hommage plus loin sur l'album, sur "Pain Away"), il nous dévoile un ordinaire constitué d'odes à l'argent ("Run Up A Check") et à la criminalité ("Wasnt Fa My Hustle", "3hree 5s & & 7s", "Million Dollar Trap Spot", "Ima Hustle"), de charges contre les salopards qui vous plantent un couteau dans le dos ("Trust Fucked Up", et "Back Stabbers", à partir du titre homonyme des O'Jays), d'histoires d'amour rudes ("In My Feelings"), d'allusions à ses filles ou à leurs mères différentes, et de ces appels à Dieu si communs dans le Sud.
Tout cela est bien exécuté, avec un bon équilibre entre solos et collaborations comme "Do Sumthang", avec YNW QuaterBaby et Lit G, cet hymne de délinquants qu'est "Like Itz Legal", avec Spitta et Cloc, et le très bon "Ima Hustle", avec Byrd. Aussi, quand bien même il est question des bobos de la vie, comme sur "Pain Away", le rythme demeure enjoué.
Bubba prolonge la tradition locale, celle d'une musique de voyou dansante et bondissante qui, plaisamment, s'inscrit à rebours du rap actuel. C'est grâce à cela et à de telles sorties, excellentes même si elles sont anodines et que, peu médiatisées, elles passent sous tous les radars, que Baton Rouge demeure, sur le long terme, la meilleure scène rap du monde.
PS : merci à Telnous Fonk de m'avoir orienté vers ce projet.
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