Yo Gotti fait partie de ces hommes, plus ou moins connus de tous, mais qui ne semblent jamais avoir eu leur moment à eux. Cela fait plus de quinze ans que le rappeur de Memphis est actif. Il a d'abord évolué en indé, dès le début des années 2000, sortant plusieurs disques par ses propres moyens. Puis il a monté sa propre structure dix ans plus tard, le CMG (Cocaine Muzik Group, renommé récemment en un plus respectable Collective Music Group), avant d'avoir eu l'occasion de sortir ses albums sur major, en 2012 et 2013, avec Live From The Kitchen puis I Am, tandis qu'un autre, The Art of Hustle, est annoncé pour cette année. Aucune de ces sorties, cependant, n'a été la grande œuvre qui permettrait à Yo Gotti de s'imposer pour de bon.
Même si ce dernier a su s'entourer depuis près de dix ans de tout ce que notre époque compte de grands rappeurs, Gucci Mane, Bun B, Rick Ross, Meek Mill, Future, Starlito, et bien d'autres encore, son registre, fait pour l'essentiel d'un gangsta ou d'un cocaine rap standard, serait presque trop générique. Sa dernière sortie, la mixtape Concelead, appuyée par DJ Drama, le prouve encore. Si elle démontre une fois de plus l'étendue de son carnet d'adresse, avec la présence (outre Snootie Wild, son compère de CMG) de Kevin Gates, Rich Homie Quan, Peewee Longway, Lil Bibby, Shy Glizzy, Boosie Badazz et Jadakiss, ses paroles ne dévoilent rien d'autre que la routine habituelle ; elles se résument à l'expression en roue libre de la fierté crasse du criminel, de son attitude crâne vis-à-vis de l'argent, des filles, de la prison et de ses rivaux.
Cependant, Concelead s'avère de bonne facture. "Super Power" est ce que son titre annonce, une affirmation étincelante par Yo Gotti de sa magificence, et le très bon "11", qui annonce l'album à venir, est une proclamation convaincante de sa street credibility. "Gold Medal", avec PeeWee Longway, est une ode assez drôle à l'art de concocter des substances illicites, tandis que "Hero", avec le freluquet Shy Glizzy, en est une autre, aussi savoureuse, sur celui d'en dealer. Et sur "Ion Feel Em", un morceau où il s'en prend aux gangsters de pacotille de l'Internet, Yo Gotti bénéficie de deux renforts de poids, celui d'un Kevin Gates à la voix décidément de plus en plus grave et écorchée (et qu'importe si son couplet semble sans rapport avec le reste) et une production mélancolique de premier choix signée Metro Boomin.
Au final, Concelead n'est un nouvel intermède, un interlude récréatif avant The Art of Hustle, une mixtape quoi, inégale et vite assemblée, Yo Gotti s'y livrant par ailleurs à l'exercice rituel du freestyle, sur le "Trap Queen" de Fetty Wap, et sur le "Water Wet" de Plane Jaymes. Mais tout de même, cette sortie vaut bien tous les albums plus officiels qu'il nous a proposés à ce jour.
PS : merci à Héra, sans qui, c'est certain, j'aurais zappé cette sortie.
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