Dans ce monde en soi qu'est la prodigue scène rap d'Atlanta, Kenneth Edward Bailey, alias Young Scooter, s'est installé en plein cœur du système, il bénéficie des relations qu'il faut. Tout d'abord, il est un ami d'enfance de Future, dont il a rejoint le Freebandz Gang, comme le montre sa contribution à la mixtape collective F.B.G: The Movie. Ensuite, il est affilié au 1017 Brick Squad de Gucci Mane, avec lequel il partage la vedette sur un récent épisode de la série Free Bricks. Ce n'est pourtant sur aucune de ces sorties que le rappeur se fait vraiment un nom, mais sur une autre, en solo, apparue un peu plus tôt cette année : un excellent Street Lottery.
Des deux parrains mentionnés, c'est de Gucci Mane que Young Scooter se montre le plus proche. Avec son registre, d'abord, dans la plus pure tradition de la trap music, une série de divagations improvisées sur les thèmes habituels de l'argent, de la cocaïne, de la rue, des filles faciles. Avec aussi ces synthétiseurs pompeux qui accompagnent le tout. Et puis avec ce phrasé, détaché et tranquille, où des rimes d'apparence simple et naïve se succèdent, l'air de rien. A ces similitudes, on pourrait ajouter aussi les récents déboires judiciaires traversés par le rappeur, si ceux-ci n'étaient pas très largement partagés au sein de toute la communauté rap.
Comme chez Gucci Mane, un fois encore, cette sortie aux allures de produit de série se distingue néanmoins du tout-venant. Grâce, sans doute, à l'aspect très musical de l'ensemble, entretenu par le flow chantonnant du rappeur ainsi que par les beats, assurés par Zaytoven, Izze The Producer, Mike Will Made It, DJ Spinz et d'autres, et par ces toutes petites mélodies qui animent quasiment chaque titre.
Street Lottery regorge ainsi de morceaux absolument irrésistibles. Le petit tube "Colombia", qui a permis à Young Scooter d'émerger, est de ceux-là, ainsi que la ritournelle "Street Lottery", l'enlevé "Run Ya Bands Up", le plus sombre "Before Rap", le virevoltant "Situation", le gaillard "Streets ain't the Same", le martial "Migo" ou encore l'hymne "Finessin".
Les collaborations, multiples, arrivent aussi à point nommé. Celles, attendues, de Future sur "Jugg Season" et "Julio", et de Gucci Mane sur "Work" et "Street Light". Celles aussi d'OJ Da Juiceman, OG Boo Dirty et Young Dolph du Brick Squad. Celles d'un Bun B impeccable comme toujours sur "Street Lottery", du cousin du Nord Chief Keef sur "On It", de Trouble sur "Before Rap", de Travis Porter sur "Beautiful Day", et, plus surprenant, de Ma$e sur "Made it Threw the Struggle". Ces voix multiples contribuent au petit exploit accompli par Young Scooter : celui de délivrer une longue mixtape faite seulement de routines et de clichés, peu prodigue en vrais tubes, et pourtant intégralement plaisante.
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