Solesides :: 1997 :: acheter cet album

Lateef the Truth Speaker avait été le premier à se faire remarquer au-delà de la Baie de San Francisco quand, en 1996, après un premier single intitulé "The Wreckoning", il avait sorti le prodigieux "The Quickening (The Wreckoning Part II)". Produit de main de maître par DJ Shadow, qui l'avait agrémenté d'une guitare aigre et de touches de piano, ce titre avait séduit tout autant Musik, magazine anglais dédié aux musiques électroniques, que The Source et Rap Pages, porte-paroles du rap américain. Lyrics Born, autrefois Asia Born, avait été quant à lui l'auteur de "Send Them" (1993), le premier single Solesides. Il était réapparu ensuite en 1996 avec "Balcony Beach", un titre apaisé où il donnait l'impression d'avoir trop tiré sur son joint, et où il récitait son texte d'un ton tranquille, accompagné de la douce voix de sa future épouse, la chanteuse Joyo Velarde.

Entre-temps, les deux rappeurs avaient étrenné une première collaboration sur "Latyrx", la face B de "The Quickening", produite aussi par DJ Shadow. Ce titre avait la particularité de laisser Lateef et Lyrics Born rapper simultanément des textes différents, en stéréo, si bien qu'on pouvait écouter deux morceaux distincts, selon qu'on le découvrait avec l'écouteur gauche ou avec le droit. Et avec les deux dans les oreilles, curieusement, ça fonctionnait aussi. "Latyrx", ainsi, démontrait également la parfaite complémentarité entre le style sec et tranché de Lateef et les bizarreries que Lyrics Born délivrait avec son phrasé plus relax et nonchalant.

C'était d'ailleurs cela, la grande attraction de ce The Album inégal et composite, pour l'essentiel une compilation des enregistrements passés des deux rappeurs, singles susmentionnés inclus. Ce n'était pas tant par l'audace des beats (signés DJ Shadow, Chief Xcel de Blackalicious et Lyrics Born lui-même) qu'il se distinguait, malgré les bidouilles électroniques d'un "Say What" et la surprise de ce "Muzzaper's Mix" qui nous transportait d'un coup en boîte de nuit avec ses grosses basses, son rythme entraînant et ses "hou hou". C'était, de manière primordiale, par les exercices de haute voltige verbale de ces deux rappeurs d'exception.