Il fut un temps où chants et raps étaient incompatibles, précurseurs à la Freestyle Fellowship exceptés. J’ai même parfois vu des fans de rap au goût sûr développer une maladie bizarre : l’allergie aux mélodies. Mais maintenant, cette époque est révolue. Les refrains ont envahi le rap, des rengaines du R&B et du "rap qu’on voit à la télé", aux chantonnements des rappeurs indés versés – ou pas – dans le mélange des genres. Même 50 Cent chante, c'est d'ailleurs l'une des raisons de son succès. Il ne faut donc pas s’étonner si Galapagos4, garant jusqu’à ce jour d’un classic rap très homogène, propose lui aussi son groupe à chansons. Cependant, la rupture n'est pas si grande. A peu de choses près, ce second album de Royce se montre finalement aussi conventionnel que beaucoup des disques raps sortis par le label de Chicago.

ROYCE – Tuff Love

Nettement plus resserré que le premier album, plus chanté, moins en divagations instrumentales, Tuff Love est le condensé de ce qu’une certaine partie du rock indé est devenue dans les années 2000 : une collection de ballades sensibles chantonnées d'une voix pas très charismatique, sur des guitares agrémentées de petites touches électroniques. Le groupe n’a pas perdu au change avec cette nouvelle formule. Il devient plus accessible que du temps de Subtleties of the Game, mais il reste tout de même assez terne et falot. On s'ennuie par moments, au point d'accueillir les bras ouverts les rappeurs invités sur ce disque. Quand ils interviennent, comme Qwel et Meaty Ogre sur le bon "City Heat" ou Mestizo et Offwhyte sur un "Ebbs and Flow" un poil trop long, cela apporte du jus aux chansons souvent fades de Royce.

Sur cet album, d’autres morceaux tirent leur épingle du jeu, comme l’humoristique "Girls on Bikes", le joli "Slip Away", un "Moment to Moments" relevé et ce chouette "Milwaukee" au faux air de My Bloody Valentine. Mais ces titres se mêlent à d'autres moins mémorables, à des instrumentaux un peu creux et à des chansons tristounettes comme "Cigarettes and Cisco". Si bien qu'au bout du compte, ce Tuff Love mi-figue mi-raisin ne s’en sort qu'avec une mention honorable. On se retrouve avec un album inégal mais qui vaut le détour, avec un disque plus ordinaire qu’il voulait être, mais somme toute tout à fait correct. On se retrouve avec une nouvelle sortie dans le plus pur style du label Galapagos4, toute chantée qu’elle soit.