MF Doom et Madlib, MF Doom et Danger Mouse, et bientôt MF Doom et Ghostface Killah. MF Doom et les extra-terrestres, MF Doom et les gendarmettes, MF Doom fait du ski. Approchez, approchez, c’est le festival au super-villain. Réjouissez-vous, critiques. Votre tour viendra. A ce rythme, chacun pourra rendre son hommage tardif à Zev Luv X et rattraper ses vingt ans de retard. Vous avez loupé son dernier disque ? Pas grave, un autre arrive déjà, avec dessus tous les noms qui vont bien de la nouvelle intelligentsia hip-hop indé. Bon, d’accord, je ne devrais peut-être pas trop la ramener, moi qui ai découvert le bonhomme avec Operation Doomsday plutôt qu’avec KMD. Et encore, même pas grâce aux singles sur Fondle’em, uniquement via le mythique site de MP3 pirates Cypher Divine. C’est vrai, j’abdique, je ne donnerai pas de leçon. Mais tout de même, jamais je ne me ridiculiserai à prétendre que cet album est extraordinaire, épatant, irréprochable, ou je ne sais quel autre adjectif louangeur et totalement inapproprié.

DANGER DOOM - The Mouse And The Mask

C’est qu’il était si naturel d'accueillir ce disque avec toutes les faveurs : "une sortie sur Lex Records, ouais, tu sais, la division hip-hop de Warp, le hip-hop que tu as le droit d’aimer, ah qu’il est trop crédible, défricheur, novateur, Def Jux, Anticon, tout ça tu vois. Et avec Danger Mouse dessus, encore en plus. Oui, Danger Mouse, le producteur hip-hop du moment". Nan mais, tout de même, sérieusement, qu’est-ce qu’il a fait ce trou du cul pour accompagner un type dont il ne dépasse pas le poil de la cheville ? Ghetto Pop Life, cet autre truc inutile sorti sur Lex ? Non, même pas. Ce producteur opportuniste a eu tout juste l’idée bête comme chou, et donc géniale, de fusionner Jay-Z et les Beatles. Ce qui lui a permis d’arriver aux manettes du second Gorillaz, un disque étonnamment bien, il est vrai, pour le coup. Mais s’il est bien, c’est grâce à Damon Albarn, j’en suis sûr, et sûrement pas à cause du Danger Mouse qu'on connaît.

Tiens, et justement, il y a quoi sur cet album ? Bah, il y a tout ce que 50 000 critiques avant moi ont décrit. Un ton badin. Un rap axé davantage sur le jeu que sur l’introspection. Des extraits d’Adult Swim saoulants en guise d’agréments pas agréables. Des petits sons dans tous les sens aussi légers qu’oubliables, aussi sexy que Barbie et aussi beaux que Ken. Une sorte de easy listening, et même pas dans l’acception réhabilitée du terme. Il y a un MC qui rappe bien, mais comme s’il venait de se lever avec une gueule de bois. Et un Ghostface Killah qui semble s’être trompé d’endroit avec son rap halluciné ; pour un peu, on le prierait de retourner auprès de Mary J. Blige ou je ne sais quelle autre diva R&B plutôt que de perdre son temps dans "l’underground" avec cette vieille gloire fatiguée et ce producteur à deux sous. Et puis qu’est-ce qui m’a mis Talib Kweli là-dedans, ce type qui n’a jamais rien fait de bon depuis un Black Star lui-même pas si terrible ? En fait, en tout et pour tout, il n’y a guère qu’un seul morceau affriolant sur cet album, ce "Benzi Box" gentiment entraînant qu’on croirait échappé de Demon Days. Tout le reste est plat, incolore, transparent, creux, creux, creux. Tellement creux.

Bon, puisque c’est ça, je m’en vais écouter le dernier Gorillaz en faisant la vaisselle. Ca me détendra. Après, je me remettrai l'increvable Operation Doomsday dans les oreilles. Et demain, on parlera de tous les disques rap indé 100 fois meilleurs qui sont sortis l’année passée. OK ?

Acheter cet album