Quelque chose cloche avec Busdriver. Tenez, prenez ce nouveau disque, sorti et disponible partout en France via Big Dada. Il est peut-être le plus séduisant à ce jour de l'impressionnant MC californien. Les beats sont infiniment supérieurs aux horreurs qui servaient de décorum à Memoirs Of The Elephant Man et à This Machine Kills Fascists, les albums sur CD-R d'il y a quelques années. Pour un large public, il est plus accessible que le culte Temporary Forever. Et il est moins bâclé que le récent et frustrant Cosmic Cleavage.
Fear Of A Black Tangent a tous les atours nécessaires. Une production finement ouvragée et variée à souhait assurée par des Omid, des Thavius Beck, des Deadelus, soit la crème de la production underground californienne. Le titre électronique enlevé ("Low Flying Winged Books"), la petite ritournelle sur piano ("Avantcore"), un rythme entre bounce et jungle, l'instru à la guitare acoustique ("Unemployed Black Astronaut") sont là. Il y a tout ce qu'il faut. Vraiment.
Pourtant quelque chose cloche.
Quelque chose qui a toujours cloché, avec Busdriver.
Lui-même n'est pas en cause. Son talent est là, il crève les yeux. Le plus digne héritier récent du Project Blowed n'a pas usurpé son titre. Son rap rapide, ses paroles loufoques et son penchant pour l'autodérision (notamment sur l'insignifiance de son public...) ne sont rien moins que réjouissants.
Mais ça ne colle pas. Son flow ne convient pas aux beats. Il n'a jamais convenu aux beats. Comme si, trop spécifique, trop virtuose, Busdriver ne parvenait jamais à trouver le bon partenaire. Ou occasionnellement, le temps de rares instants de grâce, sur le project collectif The Weather ou ailleurs.
Et ce n'est malheureusement pas ce Fear of a Black Tangent sympa, joli, cool (et plein d'autres qualificatifs à double sens et faussement louangeurs) qui dément cette maudite règle.
Rappeur trop atypique, Busdriver peine à trouver sa voie.