En 2020, nous avons eu la confirmation que la scène rap de Flint ne se résumait pas à Rio da Yung OG et à son compère RMC Mike. Leur essor, induit par leur association avec Peezy, puis par l'intérêt porté par un Lil Yachty soudainement fasciné par les rappeurs du Michigan, a par ricochet attiré l'attention sur d'autres gens issus des mêmes lieux, comme GrindHard E, YSR Gramz et KrispyLife Kidd de la communauté voisine de Beecher, ainsi qu'un Bfb da Packman désormais basé à Houston mais bel et bien originaire de l'endroit. En plus de tous ceux-là, il faut citer également Louie Ray et son compère YN Jay, lesquels, avec l'aide du grand architecte du son de Flint, le producteur Enrgy, ont sorti l'an passé le single remarqué "Coochie".

YN JAY - Coochie Land

De toute cette bande, YN Jay est le plus excentrique. Se présentant comme le "coochie man" (c’est-à-dire, grosso modo, "l'homme à chattes"), ce rappeur issu lui-aussi de Beecher semble avoir le sexe pour préoccupation première, plutôt que la dure vie de la rue. C'est en tout cas ce qu'a confirmé Coochie Land, un projet sorti en août 2020, qui a d'ores et déjà bénéficié d'une version "deluxe". Avec lui, le rappeur nous emmène pour une virée bizarre dans son parc d'attractions à lui, dédié entièrement aux plaisirs de la chair et des drogues récréatives.

Avec l'humour vicieux d'un adolescent attardé et en rut, YN Jay ne parle que de cela : des femmes qu'il entretient comme s'il avait un harem, de son comportement de pimp, de filles plus mouillées sur les Chutes du Niagara sur "Surprise", de tétons apparents derrière la chemise et de sexes féminins si imposants qu'on en voit les lèvres à travers la culotte, sur le très bon "Thittie Man". Il ne s'interrompt, par instants, que pour accompagner Rio da Yung OG sur sur un égo-trip menaçant ("Thank Me Later"), ou pour vanter le travail d'Enrgy et de ses autres collaborateurs (Marc Boomin, Baby On The Track , Beats By Sav…) à la production.

YN Jay se distingue aussi par son rap. Tout comme Rio, il déclame ses vers d'un trait, ligne après ligne, et sa musique peut parfois être nerveuse, dans la droite ligne du style du Michigan. Mais plutôt que des raps de rue tranchant, c'est un ton doux et nonchalant qu'il préfère. Il le met en valeur avec des onomatopées trainardes qui soulignent le caractère licencieux de ses paroles, ou bien par des ad-libs dont il laisse trainer la dernière syllabe ("hold ooooon"). Cette logique, il l'exploite au maximum sur le titre introductif et éponyme de l'album, l'un des plus étonnants de son répertoire, et l'un des meilleurs aussi. Il joue tant de son flow facétieux, qu'il se suffit presque à lui-même sur le minimaliste "Tik Tok". Il nous surprend jusqu'au final "Gotta Get Rich", où sa voix redevient presque normale. Alors certes, tout n'est pas mémorable sur Coochie Land, surtout si on se lance dans les 36 morceaux de la version augmentée sortie en novembre. Mais le rappeur lui, le plus singulier de Flint à ce jour, l'est indubitablement.

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