C'est l'une des lois implicite du rap : à un stade ou à un autre de son histoire, tout collectif majeur se doit d'accueillir une femme. L'une de ces écuries pourtant, et non la moindre, a longtemps fait exception à cette règle : le 1017 Records de Gucci Mane. Il a fallu attendre près de dix ans, en effet, pour qu'une rappeuse rejoigne enfin ses rangs. L'heureuse élue a été Misharron Allen, une rappeuse de Dallas qui s'est choisi Asian Doll comme nom d'artiste, quoi qu'elle n'ait strictement rien d'asiatique. Son premier projet, Da Rise of Barbie Doll Gang Empire, remonte à 2015, mais c'est l'année d'après, avec Drippin' in Glo, que la Texane a commencé à émerger. A la suite de cet album, on allait la voir côtoyer PnB Rock et Famous Dex (avec qui elle aurait été en couple, selon la rumeur) et recevoir les louanges de Nicki Minaj.
Cette reconnaissance n'a rien de surprenant. Comme les autres dolls du rap, Asian Doll est une héritière de la New-yorkaise. Comme elle, cette auto-proclamée Queen of the Teens est une victime de la mode. Obnubilée par la poupée Barbie, elle apprécie les looks les plus bariolés et les plus extravagants. Comme Nicki Minaj, aussi, sa posture est celle d'une femme dominatrice et irascible, prompte à mettre ses formes en valeur, et qui s'est illustrée par de notoires prises de bec avec d'autres rappeuses de sa génération, notamment Cuban Doll, Bali Baby et son ancienne collaboratrice Rico Nasty. Or, ce personnage haut en couleur se trouvait déjà tout entier sur cette sortie compacte de 12 morceaux enchaînés qu'était Drippin' in Glo.
Cependant, quand sur le titre manifeste de la mixtape Asian Doll proclamait "barbie gang everywhere", le mot crucial était celui du milieu. Avec ses mélodies de poche implacables, ses odes absurdes à l'argent ("Franklins", "All My Life"), ses histoires de gangs aberrantes ("Shooters"), ses menaces de mort ("Power Up"), l'ego-trip démesuré déclamé sur la musique (et avec le phrasé) du "No Flockin" de Kodak Black, l'énoncé clair de ses préférences en matière de partenaire sexuel ("Like Me") et ses poses menaçantes armes à la main dans les vidéos de "Chess" (une collaboriation avec Maserati Ye, son compatriote de Dallas) et de "Barbie Everywhere", elle suivait les pas de son futur protecteur. Au vu de son gangsta rap fleuri et exacerbé, c'est tout sauf un hasard si Asian Doll a fini par rejoindre Gucci Mane et les siens.
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