AM7 Music :: 2012 :: acheter la mixtape

Ce projet n'était pas sa première mixtape, mais il était le vrai départ du rappeur sevranais, le début du compte-à-rebours vers le triomphe. Avec l'aide des deux beatmakers mentionnées, eux-mêmes des valeurs montantes dans un rap français qui se mettait sur le tard à la trap music, il y peaufinait son style, fait d'une grosse voix menaçante et d'un sens de la formule qui ne reculait devant aucun excès. Assauts envers Marianne, métaphores très fleuries, d'inspiration souvent pornographique, voire scatologique, comparaisons à Tsahal, à AQMI ou à Kadhafi (peu importe le camp et la tendance, pourvu que ça frappe les esprits) : tout était bon à prendre, même les vers les plus forcés ("habite", par exemple, rimait avec "ma bite"...), la seule limite au rap bulldozer de Kaaris. Il faisait flèche de tout bois, pourvu qu'elle atteigne sa cible et qu'il alimente son ego-trip démesuré.

Quant à la musique, qu'elle soit l'œuvre de 2031 et 2093, ou d'autres gens encore, comme Wealstarr, Kilogrammes ou Djouz, elle décuplait la brutalité des paroles, avec les synthés pompiers et les rythmes épileptiques popularisés huit ou dix ans plus tôt de l'autre côté de l'Atlantique. Seules, parfois, quelques sonorités de type world music s'éloignaient de la formule, singularisant quelque peu ce projet.

Ce dernier, donc, frappait fort. Cependant, même s'il était commercialisé, Z.E.R.O restait avant tout une mixtape. Il n'était pas le produit fini qu'Or Noir sera l'année d'après. Kaaris n'y avait pas totalement remisé au placard les maladresses habituelles du rap français, par exemple son côté pleurnicheur ("Hémophiles"), ou l'engagement politique à deux sous. Même si le conclusif "Super Nova" annonçait très clairement la suite avec son caractère triomphateur et ses paroles finales ("le Rap Français est K.O, qu’il cligne des yeux s’il m’entend"), ce projet n'était encore que l'ébauche, le brouillon de l'album à venir. Mais être le brouillon de la future grande référence de la trap music à la française, ça n'était déjà pas si mal.