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L'irruption de Big K.R.I.T. au grand jour devait beaucoup au succès viral de la vidéo de "Hometown Hero", un titre habilement bâti sur un sample du "Hometown Glory" d'Adele. Mais c'est un autre single présent ici, qui deviendrait le plus emblématique du rappeur : "Country Shit", un hymne à ses racines sudistes et rurales, était un vrai tube, et il sonnait plus UGK que nature. Bun B apparaîtrait d'ailleurs sur une version ultérieure de ce morceau, en plus de Ludacris.

Placé au début, ce titre annonçait une mixtape pleine d'une musique souple et suave, fourrée de samples de chants ou d'instruments soul ("Just Touched Down", "They Got Us", "Something", "2000 Beyond", etc.), avec parfois de grosses voix screwed ("Hometown Hero ") et quelques scratches ("As Small as a Giant"), une mixtape dédiée pour partie à l'affirmation de soi ("Viktorious", "See Me on Top"), et pour partie aux plaisirs illicites, ceux de la fumette ("No Wheaties", avec les grands fumeurs Smoke DZA et Curren$y), ou ceux d'une vie de pimp ("Moon and Stars", avec Devin the Dude, "Glass House", avec Curren$y encore, et Wiz Khalifa, lequel a aussi inclus ce titre sur sa propre mixtape de référence, Kush & OJ).

Il y avait suffisamment de titres sur cette très (trop) longue mixtape, pour que Big K.R.I.T. puisse aussi présenter une autre facette de sa personne, avec des titres plus réfléchis et intimes comme "Something", "Neva Go Back", "I Gotta Stay" et le très beau finale "Voices". Il virait même "rap conscient" sur "Children of the World", "Small as a Giant", et ce "They Got Us" qui révélait la face sombre du monde interlope célébré ailleurs sur la mixtape. Sur K.R.I.T. Wuz Here, avec des morceaux comme l'autobiographique "Good Enough", Big K.R.I.T. était déjà l'être dual que présenterait plus tard la pochette d'une autre de ses mixtapes, 4Eva N a Day en 2012, laquelle mettrait en scène un enfant partagé entre l'église et le strip club. Il usait de ce thème éternel et rabâché, de cette vieille scie, celle de l'homme noir déchiré par ses contradictions, tenté autant par le diable que par Dieu.

Et c'était là tout Big K.R.I.T., c'était sa force comme sa faiblesse, sur cette mixtape étalon comme sur celles qui suivraient : sa trop grande fidélité à un long héritage, ses airs de premier de la classe rap sudiste, d'élève trop appliqué, jouant du stéréotype, risquant la platitude ("si j'avais des ailes, je m'en irai", nous chante-il la main sur le cœur, sur "I Gotta Stay"), manquant d'originalité, nous offrant généralement des titres bien fichus mais creux, hormis quelques vraies fulgurances comme "Country Shit" et quelques autres perles éparses.