Acuarela :: 1998 :: acheter ce disque
Dès le début de leur deuxième album, le premier à s’être frayé un chemin jusqu’en France, le plus réussi, aussi, Migala balayait tout ce que l’on croyait savoir de la musique espagnole. Pour nous, pauvres touristes, elle se résumait à quelques souvenirs d’été festifs, aux rythmes frénétiques de la makina, ou au très démonstratif flamenco. C'est à cela que nous étions préparés. Mais sûrement pas aux mélodies amères et lentes que proposait cet étonnant sextet madrilène.
Tout à coup, Migala révélait qu’en Espagne, existait une scène cousine du rock éthéré et neurasthénique de San Francisco, ou du néo-folk aride et désolé de Will Oldham et de son Palace ("On Not Given Farewells...", "When I Go, I Go") ; qu’il y avait des artistes capables d’instrumentaux doucement expérimentaux dans la lignée du post-rock (témoin la lente introduction de "Low of Defenses", ou les violons et synthétiseur de "Guetaria") ou de petites ritournelles rétro dans un style très Yann Tiersen ("Dactylographique") ; que le spleen avait sa place au pays du soleil éternel, que Smog et Bill Callahan avaient des cousins à Madrid.
Et il ne s’agissait pas de vils copieurs. Non. Le magnifique et morriconien "Gurb Song", le délicat "Ancient Glaciar Tongues", un "Regular Storm Sounds" presque up-tempo, étaient de vrais bons titres poignants et originaux. L’album était d’une consistance et d’une solidité à toute épreuve. Les piano, accordéon et violon étaient dosés avec attention, ils coloraient les guitares aux moments les plus fortuits. Comme le confirmerait la distribution de l'album suivant, Arde, par Sub Pop, Migala avait sa place chez ses homologues américains, il était leur égal.