COMPTON’S MOST WANTED – Music To Driveby

COMPTON’S MOST WANTED – Music To Driveby

Sorti le 29 septembre 1992,
chez Orpheus Music et Epic Records.

La voiture a souvent occupé une place centrale dans le rap, et tout particulièrement dans sa déclinaison gangsta. Ce n’est pas un hasard si tant vidéos rap en ont exhibées, si le hip-hop de truand ne s’est jamais aussi bien épanoui qu’à Los Angeles et à Houston, des villes tentaculaires connues pour vouer un culte à l’automobile, et si certains de ses meilleurs artéfacts, ce Music To Driveby par exemple, font nommément référence au plaisir de conduire. A tous ceux qui n’ont jamais goûté ce style, le titre de cet album de Compton’s Most Wanted livre un précieux indice : car c’est bien ainsi, quand, au volant, on s’apprête à conquérir le monde, que le gangsta rap s’apprécie le mieux.

Enregistré quasiment en solo par MC Eiht, son comparse MC Chill étant alors incarcéré, le troisième album du groupe nous offre du rap de gangster dans toute sa splendeur, à la limite du cliché, dans le plus pur respect de la formule popularisée par N.W.A, puis perfectionnée à la sauce g-funk. Saupoudrés des « g’yeah » caractéristiques du rappeur, les textes abordent les thèmes de rigueur.

Sur Music To Driveby, il est question de la pauvreté du ghetto (« Niggaz Struglin’ »), de la dureté des gangs (« Walk on By », « This Is A Gang ») et de délinquance ordinaire (« Jack Mode », « N 2 Deep » avec Scarface). Le rappeur se fend d’un hommage au quartier avec « Compton 4 Life », et il donne dans une misogynie habituelle sur « Hoodrat » et « U’s a Bitch ». Enfin, teigneux, MC Eiht déverse de la bile, il donne dans le « beef », dans le « diss », se joignant à la guerre Est / Ouest en répondant au « Fuck Compton » de Tim Dog sur « Who’s Fucking Who? », et attaquant à trois reprises, rien que ça, le voisin DJ Quik.

Les paroles sont mordantes, mais les beats, cools et suaves, sont en contrepoint. Les sons proposés par The Unknown DJ et par quelques autres samplent massivement la soul généreuse d’Isaac Hayes et de Barry White sur « Hood Took Me Under », « Niggaz Strugglin », « Another Victim » et « I Gots Ta Get Over ». Et les instrus sont dotées d’un feeling très live avec la basse douce et funky de « Duck Sick II », la guitare acerbe de « Dead Men Tell No Lies » et les coulées de saxophone, de piano et d’orgue de « Hoodrat » et « U’s a Bitch ». Tous ces titres, soyeux, gouleyants, transforment le gangsta rap en une musique d’ambiance, en un easy listening pour criminels, en une bande-son à apprécier pleinement les mains sur le volant. A écouter bercé par les cahots de son véhicule. Avec ou non pour destination finale, comme le suggère les flingues de la pochette, un « drive-by shooting »…

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The Notorious S.Y.L.V.

The Notorious S.Y.L.V., a.k.a. Codotusylv, écrit sur le rap et tout un tas d'autres choses depuis la fin des années 90. Il fut le fondateur des sites culte Nu Skool et Hip-Hop Section, et un membre historique du webzine POPnews. Il a écrit quatre livres sur le rap (dont deux réédités en version enrichie), chez Le Mot et le Reste.

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