POOH SHIESTY – Shiesty Season

Le Gucci Mane de 2021 n’est assurément plus celui de 2011. Non seulement a-t-il perdu de son éclat, mais son entourage lui aussi, n’est pas des plus affriolant. Il y a dix ans, le grand maître de la trap music parrainait Waka Flocka, Young Thug, Hoodrich Pablo Juan, OJ da Juiceman, et même Chief Keef, des gens qui, pour certains, ont changé la face du rap. Alors qu’aujourd’hui, qu’y a-t-il à retenir de ce « nouveau 1017 » révélé l’an dernier sur la compilation So Icy Gang ? Outre Veeze (qui a le mérite de venir du bon endroit, le Michigan), qu’avons-nous donc à attendre de Foogiano, Tay Keith, Mulatto, K Shiday, Big30, Big Scarr ? Au sein de cette bande, toutefois, à l’écoute de sa « mixtape » sortie plus tôt cette année (en vérité son premier album), Pooh Shiesty pourrait faire exception.
Lontrell Williams Jr., qui provient de cette bonne ville de Memphis, s’est d’abord fait remarquer en 2019, avec le morceau « Shiesty Summer », attirant l’année d’après l’attention de Gucci Mane. Ont suivi leur collaboration sur « Still Remember », ainsi qu’un titre avec Lil Baby & Big30 « Monday To Sunday », tous deux présents sur So Icy Summer, un autre projet compilatoire de Guwop. Adossé comme toute la bande du New 1017 à la major Atlantic Records, Pooh Shiesty a commencé aussi à côtoyer quelques gens notoires, outre Lil Baby, Moneybagg Yo sur « Main Slime », et Lil Durk sur « Back In Blood », son premier tube classé au Billboard. Désormais bien calé sur sa rampe de lancement, il ne lui restait donc plus qu’à sortir son projet rien qu’à lui, Shiesty Season.
Disponible depuis février et enrichi depuis par une version « deluxe », celui-ci est globalement une réussite. Fidèle à son pseudonyme (« sheisty », en argot, désigne quelqu’un d’égoïste, de malhonnête et de désagréable), Pooh Shiesty accumule les menaces de meurtre, il égrène les promesses de violence, gardant ses armes à portée de main. Et il délivre ainsi une palanquée de petits tubes, comme avec le piano minimaliste du susmentionné « Back In Blood », la guitare chaloupée de « Guard Up », les accélérations de tempo de « Neighbors », avec Big30, l’évanescent « Master P » et les pianos anxiogènes de ce « Twerksum » qui conclut admirablement l’album.
A force, il est vrai, avec son flow imperturbable de gangster glacial, Pooh Shiesty paraît répétitif et linéaire. Et ses ad-libs à lui, des « blrrrd » envahissants, s’avèrent vite lassants. On tombe dans l’ennui, avec des passages aussi peu inspirés que « Take A Life » et « Gone MIA ». Mais sur Shiesty Season, il y a aussi ce qu’il faut d’invités pour remédier à cela, comme quand 21 Savage sauve le médiocre « Box Of Churches », que Veeze vient agrémenter de sa voix nouée « Making A Mess », l’un des morceaux les plus relevés de l’album ou que Lil Durk se montre éblouissant, avec les propos agressifs d’un « Back In Blood » sorti ironiquement le jour où est mort son protégé King Von. Pooh Shiesty, qui a ajouté une collaboration avec G Herbo sur l’édition augmentée de l’album, est désormais voué à se mouvoir en belle compagnie. Et cela lui réussit.