BENNY THE BUTCHER – The Plugs I Met 2

On y est. Après l’ascension au milieu de la décennie précédente, puis l’appui du Roc Nation de Jay-Z, le fruit est mûr pour Benny the Butcher. Il est placé sur orbite, il est définitivement coopté par les grands, comme avait déjà pu le montrer son dernier album, un Burden Of Proof aux airs de blockbuster compte-tenu du renfort de gros poissons tels que Rick Ross, Lil Wayne, Big Sean, voire Freddie Gibbs, et de la production assurée par Hit-Boy. Plutôt que ce dernier, cependant, la vraie œuvre marquante de Benny a été la précédente, un plus concis et ramassé The Plugs I Met, placé sous l’égide d’Alejandro Sosa et de Tony Montana, auquel le rappeur a donné un successeur en 2021.
Tout aussi court, ce deuxième volet trouve malgré tout suffisamment de place pour convier quelques autres grands du rap : Black Thought, Jadakiss et Pusha T sont remplacés par Fat Joe, 2 Chainz, et par des Jim Jones et French Montana désormais rabibochés. Il reprend la même idée que le premier, mettant en scène sur la pochette un autre moment-clé de la rencontre entre les deux trafiquants de Scarface. Mais cette fois le concept est peaufiné et systématisé. Sur « When Tony Met Sosa », Benny assimile sa réussite dans le rap à ce moment clé du film. Il y déclare aussi, avec fierté, continuer à représenter le ghetto plutôt que de se faire poète ou artiste. Il dit ne traiter que d’un seul thème, l’éternel, celui du deal de stupéfiants, et de ses à-côtés, les armes à feu (« Live By It »), l’impératif de survie (« Longevity ») et la mort violente qui menace à chaque coin de rue (« Survivor’s Remorse »).
Comme sur Burden Of Proof, le son est pris en charge par un producteur unique : cette fois, Harry Fraud. Celui-ci apporte à The Plugs I Met 2 l’ambiance cinématographique adéquate, qu’il nourrit ça et là de samples pas banals, tels que celui de Sai Yoshiko sur « Plug Talk ». Il lui donne l’allure idoine d’une bande originale, comme sur cet « Overall » où intervient de manière posthume le rappeur Chinx, assassiné en 2015. Enfin, mis à part le single « Thanksgiving », la toute première collaboration entre les deux hommes, qui clôt l’album sur une touche fière et relevée, Harry Fraud déploie quelques merveilles de mélancolie, comme le très beau « No Instructions » et ce « Longevity » souligné par quelques notes de guitare et par une voix évaporée, des morceaux qui conviennent parfaitement à ce rap de bandit où le dépit et la résignation, bien souvent, l’emportent sur la glorification.