UGK – Ridin’ Dirty

UGK – Ridin’ Dirty

UGK, ça signifie Undergound Kings. Et Pimp C comme Bun B ont été cela pour de bon : des rois souterrains. Ils ont été le plus grand groupe d’une scène texane fertile, juste après les Geto Boys, qui eux ont eu la chance d’être exposés plus tôt. En ce qui concerne le duo, il faudra le triomphe du Dirty South dans les années 2000, pour qu’il soit couronné pour de bon, et révéré à large échelle. Pourtant, dès la décennie 90 et leurs premiers albums, son art est déjà à maturité.

Tous n’ont pas reconnu de suite le talent d’UGK. Souvent considéré comme leur meilleur (même si des aficionados lui préfèrent ceux d’avant), il faut admettre que ce troisième album contient des titres dispensables, par exemple ce « Pinky Ring » funky mollasson. Vu de loin, il se démarque peu du registre de vigueur à Houston. C’est du rap de gangsters qui œuvrent à des heures indues (« 3 In The Mornin' »), arborent des flingues (« That’s Why I Carry »), sont prêts au meurtre (« Murder ») et apprécient les virées en voitures (« Diamonds & Wood »), des voitures qui sont un appât pour leurs groupies (« Fuck My Car »). Tel est d’ailleurs ce que « ridin’ dirty » veut dire : être au volant d’un véhicule chargé d’armes et de drogue, ce passe-temps des Texans les moins fréquentables.

Cependant, ce gangsta rap là sait vous prendre par les tripes, dès cet admirable « One Day » où, avec le mésestimé 3-2, nos rappeurs se lamentent sur la perte de proches emportés par une existence dangereuse. Ils y parviennent d’autant mieux que tout l’album bénéficie d’une production extraordinairement souple, bâtie par un Pimp C qui, fort de son bagage de « vrai » musicien, a su garder l’oreille fine. Le duo de Port Arthur ne serait pas devenu une telle référence sans sa musique, sans la présence forte du lourd héritage de la Great Black Music, de cette soul née pas bien loin de chez eux, sans ce feeling très organique perceptible sur « Hi-Life », ainsi que sur « Ridin’ Dirty » et derrière le spoken word de cette longue et délicate « Outro », ou dans les chants suaves qui parsement leurs morceaux, notamment celui de Ron Isley sur ce « One Day » décidément splendide.

C’est par cette démarche, qui pousse plus loin celle lancée par les Californiens avec leur g-funk, c’est par ces beats chargés d’un lourd passé musical qu’ils partagent avec Outkast, Goodie Mob ou Eightball & MJG, que les deux d’UGK ont gagné leur place parmi les fondateurs du rap sudiste.

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The Notorious S.Y.L.V.

The Notorious S.Y.L.V., a.k.a. Codotusylv, écrit sur le rap et tout un tas d'autres choses depuis la fin des années 90. Il fut le fondateur des sites culte Nu Skool et Hip-Hop Section, et un membre historique du webzine POPnews. Il a écrit quatre livres sur le rap (dont deux réédités en version enrichie), chez Le Mot et le Reste.

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