SLEAZYWORLD GO – Where The Shooters Be

SLEAZYWORLD GO – Where The Shooters Be

Ses fameux Freshmen qui sont censés être les rappeurs du futur, on sait comment le magazine XXL les sélectionne. Soit ils ont déjà fait du bruit, soit ils sont une priorité d’investissement pour leurs labels. Originaire de Grand Rapids dans le Michigan, mais basé depuis l’adolescence à Kansas City, SleazyWorld Go vient tout juste d’intégrer la dernière promotion, et il remplit les deux critères.

Il est signé depuis peu chez Island, et c’est comme par hasard peu de temps après les avoir rejoints qu’est sorti son titre référence, « Sleazy Flow », un succès sur les réseaux sociaux. Son vrai morceau de bravoure, cependant, celui qui a attiré l’attention de la filiale d’Universal Music, c’est « What They Gone Do To Me », un single sorti un peu plus tôt. C’est lui qui a distingué Joseph Isaac, un jeune rappeur qui, comme tant d’autres avant lui, s’est dit lors d’un séjour en prison qu’une carrière dans le rap valait mieux que la délinquance. Celle-ci est malgré tout l’influence principale de Where The Shooters Be, une « mixtape » signature sortie en 2022 avec trois procédés marketing bien rodés : un remix du tube « Sleazy Flow » avec une star (ici Lil Baby), plusieurs autres collaborations de prestige (Offset, G Herbo, Rich The Kid…), puis la sortie quelques mois plus tard d’une version augmentée.

Là où sont les shooters, donc, s’intitule cette mixtape. Autrement dit le monde du rappeur. Celui rythmé par ces armes à feu qui sont au cœur du propos. Celui des Glock, des MAC, des TEC et des Smith & Wesson, pour ne parler que des marques et des modèles cités sur le titre « Glock Perfection ». C’est cela que SleazyWorld Go décrit avec ses vignettes qui dépassent rarement les deux minutes. D’autres l’on fait avant lui, mais sa manière est souvent saisissante. Il leur apporte une lumière particulière, à travers un ton grave, une musique riche en pianos posés, sur le même modèle que « What They Gone Do To Me » et « Sleazy Flow », et un flow surprenant quand il est marqué de poses impromptues comme sur « Troll Me », quand il passe du murmure à la proclamation, ou qu’il est exalté sur « Free YSL », à la manière de celui auquel ce morceau est dédié, Young Thug.

Programmé pour le succès, le rappeur dépeint toutefois un monde dépourvu de glamour. A part les dispensables morceaux réglementaires (la bluette « Different » et ce dépressif « Public Housing » à Auto-Tune), il n’est question que d’un quotidien violent, dont les seules pauses sont des relations sexuelles brutales, parfois vénales, et dénuées de sentiments. Il parle sur un ton résigné d’expéditions punitives, comme avec le très bon « Creepers ». La musique est excessivement minimaliste, comme sur ce « Step 1 » avec Offset, qui n’est peu ou prou constitué que d’une note. Et certains titres sont étranges, comme cet inquiétant « Whateva Whoeva Howeva » avec Fredo Bang, une autre réussite.

Avec cette « mixtape », SleazyWorld Go montre qu’il n’est pas l’homme d’un seul titre, ni même de deux. Ce Where The Shooters Be est très bon, dans sa version originale comme dans l’enrichie. Voyons voir si ce talent se confirme avec Comer, un premier album officiel annoncé pour bientôt.

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The Notorious S.Y.L.V.

The Notorious S.Y.L.V., a.k.a. Codotusylv, écrit sur le rap et tout un tas d'autres choses depuis la fin des années 90. Il fut le fondateur des sites culte Nu Skool et Hip-Hop Section, et un membre historique du webzine POPnews. Il a écrit quatre livres sur le rap (dont deux réédités en version enrichie), chez Le Mot et le Reste.

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