En cette année 1 de l'après Young Dolph, continuons à passer les troupes en revue. Après Key Glock et Big Moochie Grape, et avant de se pencher peut-être sur Jay Fizzle, attardons-nous donc quelques instants sur un autre rappeur de l'écurie Paper Route Empire. C'est d'autant plus nécessaire que, comme avec les autres, l'inspiration de Kenny Muney ne semble pas trop souffrir de la perte de son "Role Model", comme il l'appelle sur le titre du même nom, un morceau déjà entendu sur la compilation hommage Long Live Dolph et qu'il redéploie sur son dernier album, Time Is Muney.

KENNY MUNEY - Time Is Muney

Cet album est sorti tôt dans l'année, suffisamment près de la mort de Young Dolph pour que ce dernier ait pu jouer encore au conseiller artistique et aider Kenny Muney à sélectionner ses meilleures flèches. Et ils en ont déniché plusieurs, notamment "Petro" avec sa guitare mélancolique, et le superbe finale produit par Hitkidd, "Change Up", avec le même instrument. Ce ne sont que deux exemples. A part la très dispensable bluette "Nobody" et quelques autres moments superflus, tout l'album, peu ou prou, est satisfaisant.

Kenny Muney, à bien des égards, est le pur produit de Paper Route Empire. Issu de South Memphis, il s'est d'abord perdu dans des embrouilles, et comme son futur patron, il a été la cible d'une fusillade, ce dès l'âge de 15 ans. Puis il a trouvé la rédemption dans le rap, avec le succès en 2016 de son "YTN Freestyle". Il a attiré alors l'attention de la major Atlantic, et par l'intermédiaire de Key Glock, son ami d'avant la musique, il a rejoint la fière bande à Dolph, chez qui est sorti en 2019 son album de référence, Muney Talk.

Logiquement, donc, Time Is Money est un vrai produit-maison. Cela se reconnaît au flow précipité, à l'humour pince-sans-rire et au tralala caractéristique de la trap music : Kenny Money travaille dur ("No Days Off"), il gagne beaucoup d'argent ("Used Too"), il se méfie des suceurs et des faux-culs ("Leeches"), et plus généralement, il en ramène et il en fait des tonnes ("Choosin", "Rabbit", et partout ailleurs).

Nul besoin pour le rappeur de s'embarrasser de main d'œuvre étrangère. Dreezy, qu'il a rencontrée au cours d'une tournée, est la seule invitée extérieure à Memphis. Les autres sont ses compagnons Key Glock et Big Moochie Grape. Et parmi la cohorte des beatmakers, outre le Hitkidd déjà mentionné, deux au moins sont des autorités dans sa ville, Tay Keith, et Bandplay bien sûr, qui nous offre les productions de choix "Can’t Make This Up" et "Used Too". C'est authentiquement local. C'est totalement Paper Route. Et c'est ce qui témoigne le mieux de la postérité de Young Dolph.

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