Aux yeux du monde, le rap de Baton Rouge est représenté aujourd'hui par Kevin Gates et par NBA YoungBoy, tous deux signés sur la major Atlantic. Toutefois, comme souvent pour qui cherche à atteindre le succès à l'échelle nationale, ils se sont éloignés de leurs racines, et leur rap lent et douceâtre ne rend plus tout à fait compte de leurs origines.

JUNGLE MUZIK LARRY - 56DD

Jungle Muzik Larry, lui, est nettement moins illustre que ces deux-là. Aperçu dès 2016 sur "Cross Me", au côté de 70th Street Carlos, autre valeur montante de la ville, il rayonne peu au-delà de ses bases et de sa chaîne Youtube. Son seul fait d'arme est d'avoir été désigné en 2017, par le magazine XXL, comme l'un des rappeurs à surveiller dans la capitale de la Louisiane. Cependant, comme l'a démontré l'an dernier la mixtape 56DD, son style est bien plus fidèle à la formule qui, autrefois, a placé Baton Rouge sur la carte du rap.

Jungle Muzik Larry nous ramène dix ou quinze années en arrière, à la grande époque de Webbie et de Boosie, quand ce rap de mauvais garçons était encore dansant, quand il s'inspirait fortement du style bounce en vigueur chez les voisins de La Nouvelle-Orléans, et qu'il était festif et entrainant.

C'est une musique bondissante et jaillissante que nous offre 56DD. Ce sont des titres rythmés et lourds en basses, tel "Question Of The Day". Ce sont des sons de carnaval, comme avec l'efficace "Bout That Shit". Ce sont des hymnes de thug à l'ancienne comme ce redoutable "Murder Rate" où, avec ses acolytes DrecoStreet et JMM Coco, le rappeur nous invite fièrement à augmenter le taux d'homicides.

La mixtape, toutefois, n'est pas dépourvue de mélodies, comme le prouvent le refrain chanté de la prière pour délinquants "Mercy On Me", la guitare de "Livin' Life Now", cet irrésistible "Talibans", avec MoneWay Dee, dont les sons chaloupés évoquent ceux du reggae, sans oublier les vocalises sous Auto-Tune de l'accrocheur "Choppa Season".

Quelques-uns de ces titres plus suaves sont nettement plus dispensables, comme "Hood Vibes", "In My Feelings" et le conclusif "What Lovin' Gon Do", et pour cette raison, 56DD n'est pas exempt de tout reproche. Il ne sera sans doute jamais retenu par l'histoire comme un jalon. Mais à l'heure du rap tout mou de chialeurs, sa formule dansante, vibrante et rythmée est exactement ce qu'il nous manquait.

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