75 Ark / PIAS :: 2000 :: acheter ce disque
Inutile de chercher un tube chez APC : Tragic Epilogue était de ces disques qui se méritent et qui se bonifient avec le temps. Cela était vrai pour la musique, sorte d'électro lent, assemblage de sons synthétiques et dépouillés, hostile aux samples trop voyants et bâtie sur des rythmes travaillées. Cela était vrai aussi pour les paroles, obtuses, et scandées magistralement par trois voix mémorables. Cerise sur le gâteau, le trio s'adjoignait sur cet album les services de deux rappeurs cultes et virtuoses, deux vétérans de l'undergound hip-hop, ses grands parrains : Pharoahe Monch d'Organized Konfusion, sur l'obsédant "What I Am", et Aceyalone de Freestyle Fellowship sur le long, l'inquiétant et l'indianisant "Heatrays".
Tout cela était d'une grâce ténébreuse peu entendue depuis Funcrusher Plus, d'une étrangeté comme seul ce cinglé de Kool Keith l'affectionnait. Avec le soutenu "Laundry", l'electro incisive de "Nude Paper", le calme malsain de "Your World Is Flat", le futurisme de "Here They Come Now", l'insistant et expérimental "Moon Zero X-M", le rêche "Lift", le free jazz de "Eyewall", le long et langoureux "Sllab", les basses puissantes de "Smores", un "Disorientation" interprété en partie par la rappeuse Apani B et le bizarre "What I Am", Antipop Consortium proposait l'une des plus saisissantes suites de titres jamais entendues sur un album rap.
Les atours expérimentaux de Tragic Epilogue et l'étrange poésie de ses trois principaux protagonistes poussaient le rap dans de nouvelles directions. Mais en même temps, de manière paradoxale, ils le ramenaient à l'époque de Downtown Manhattan quand, au début des années 80, les premiers rappeurs s'étaient mêlés à l'intelligentsia artistique de New-York, quand rap et musique électronique n'avaient pas encore divorcé, et enfantaient des morceaux bizarres et délicieux.
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