Fingerprint Records, jusqu’à l’an passé, c’est un label dont je n’avais que vaguement entendu parler, au détour d’une ou de deux chroniques aperçues sur le Web. Mais je n’avais jamais creusé. Jusqu’au jour où, informant le patron du label de ma chronique du dernier Nobs, il propose de m’adresser son premier album solo. C’est ainsi que je me suis retrouvé avec entre les mains et les oreilles la meilleure surprise de l’année 2005, un Karma Kingdom qui correspondait pile poil à ce que j’avais alors envie d’entendre en matière de rap. Inutile donc d’expliquer d’où est sortie mon idée d’en apprendre plus sur Eibol, son talentueux créateur.

EIBOL

Tu es à la fois rappeur, producteur et patron de label. Mais à la base, tu étais quoi ? Comment es-tu entré dans le hip-hop ?

Je vais répondre à ta dernière question. Le hip-hop, j’y suis venu comme ça. Avec Losaka et Hippo, on avait pris l’habitude d’écrire des textes, d’enregistrer des cassettes, de les filer à des copains. Ces derniers aimaient bien, ils nous encourageaient. Alors on a décidé de prendre tout ça au sérieux et de devenir un peu plus professionnel.

J’ai toujours fait partie de groupes à l’école, j’ai grandi avec une batterie et un saxo, et mon père jouait dans plusieurs groupes. Je l’écoutais jouer, tant et si bien que ça a fini par faire partie de ma vie. Vers 97/98, Losaka a été le premier à acheter un MPC. On s’y est tous essayés, on a commencé à faire nos propres beats et à les enregistrer. On était plus ou moins du même âge. Los et moi étions dans la même école d’ingénieurs du son. Il a eu son diplôme et j’ai laissé tomber. On a décidé de lancer un label hip-hop tenu par ses propres artistes, et c’est ainsi qu’est né ce que tu connais sous le nom de Fingerprint Records.

C’est ainsi que ça a commencé côté business pour moi. J’ai commencé à écrire vers 97/98, je me suis essayé aux instruments et la production me tendait les bras. J’avais quand même appris à les fondamentaux à mon école. Si la vraie question c’est de savoir quel est mon point fort, je répondrais la production.

Et le nom Eibol, il vient d’où ? Qu’est-ce qu’il veut dire ?

OK. Il a été prononcé de toutes les façons ! Ca se prononce comme "eye ball". Quand j’étais gosse, ma mère avait la fâcheuse habitude de tout perdre dans tous les coins. Elle m’appelait "Eagle Eye Ball" parce qu’elle m’appelait toujours à la rescousse pour retrouver ce qu’elle avait perdu, par exemple un bout de boucle d’oreille ou quelque chose par terre qu’elle était incapable de voir… J’arrivais à tout trouver en deux secondes, comme si ça avait toujours été là, alors qu’elle avait cherché une heure avant de m’appeler. Touchant, n’est-ce pas ? Ah ah ah !

L’orthographe particulière du nom vient de mes premières sorties avec des copains. Tagguer "eye ball", c’était un peu long. C’est donc devenu "Eibol", pour aller plus vite. Ce qui n’avait pas la moindre importance puisque j’étais un petit joueur qui ne tagguait que les banlieues tranquilles.

Avec quel genre de hip-hop as-tu grandi ?

J’ai grandi avec des tonnes de trucs. J’étais entouré de types plus vieux que moi dans les années 80 et les 90, ce qui m’a exposé à des tas de choses inconnues de mes semblables. Je leur dois ça. J’ai tout écouté, du rap afrocentrique de Brooklyn comme X-Clan et les Native Tongues (Jay Dee, même si je ne savais peut-être pas encore que c’était lui) aux groupes West Coast, merci Los et Hippo. J’ai été très influencé par les Native Tongues et par Digable Planets, mais je ne me limite pas à ça. J’avais un pote dont le grand frère, Germaine, faisait des mix tapes au tournant des années 80 et 90. Qu’est-ce que je ne donnerais pas pour récupérer toutes ces cassettes !

Et aujourd’hui, c’est qui tes artistes hip-hop préférés ?

Mes préférés, bien sûr, ce sont tous les gens que je côtoie chez Fingerprint. Pas seulement parce que je pense que ce sont des grands artistes avec quelque chose à offrir, mais aussi pour toute l’inspiration qu’ils m’apportent. Comment ne pas apprécier des gens qui te poussent à progresser ? A part Fingerprint, je citerais des types comme J Dilla (RIP, encore et pour toujours), Lodeck, Andre 3000, Cee-Lo Green, Count Bass D, MF Doom, Dan the Automator, Prince Paul, Madlib, pour n’en citer que quelques uns… Et ne me lance pas sur les autres genres musicaux. Je pense qu’il faut garder un certain équilibre en matière de musique, je suis donc loin de me limiter au seul hip-hop.

Tu es actif depuis plusieurs années, mais ton premier album solo, Karma Kingdom, n’est sorti que l’an passé. C’est une compilation de vieux morceaux ou quelque chose que tu as enregistré récemment ?

NON, Karma Kingdom se devait d’être un nouveau projet personnel. J’ai tenu à assurer tous les sons et tous les textes de l’album. J’ai pris mon temps, mélangeant mes sons avec des instruments live et éprouvant mon propre style. J’avais envie de produire quelque chose que je pourrais toujours entendre deux ans plus tard, quelque chose dont je puisse rester fier. Et je suis satisfait du résultat.

Selon moi, Karma Kingdom est l’un des meilleurs albums hip-hop de 2005. C’est une opinion partagée par d’autres critiques ? Quels retours as-tu eu sur cet album ?

Merci. D’une certaine façon, ça me donne un sentiment d’accomplissement d’entendre des choses comme ça. Il y a eu un bon consensus, ça m’a fait plaisir de voir un public attiré par ce projet et manifester leur intérêt. Beaucoup m’ont dit directement le bien qu’ils pensent de mon album. J’ai été chroniqué par URB Magazine et ils ont dit que j’allais détrôner DJ Shadow… Ca m’a bien fait marrer vu le matériel de seconde zone que j’ai utilisé pour faire ce disque. Je suis convaincu que ce n’est pas seulement par chance que j’ai eu tant de retours positifs, j’ai vraiment bossé dur sur ce projet, j’ai le sentiment d’avoir fait un disque où tout le monde peut trouver quelque chose, et je pense que c’est ce que les gens respectent.

Karma Kingdom est sorti pas plus tard que l’an dernier. Tu prévois tout de même un nouvel album prochainement ?

J’ai un nouvel album solo en préparation. Je ne suis pas le genre de type qui pense qu’il doit sortir un album tous les 3 ou 4 mois pour rester dans le coup. Je veux montrer tant de facettes sur un projet que je prends mon temps pour créer l’œuvre la plus achevée possible et pour la proposer à des oreilles extérieures. J’ai brassé tout un tas d’idées pour mon nouveau projet, mais en même temps, je continue à tourner pour promouvoir Karma Kingdom ici aux States. Je ne me précipite donc pas.

EIBOL

Il semble que Fingerprint Records a un minimum d’histoire derrière lui. Tu peux nous en dire plus ? Tu es bien son fondateur ?

A la base, c’est Losaka, Hippo et moi qui nous nous sommes rencontrés au lycée et qui avons commencé à faire de la musique sous le nom de Hand Held Aspects. Après nos années d’étude, nous avons décidé de lancer un label et de voir jusqu’à quel point on pouvait sortir notre musique et celle d’autres artistes locaux qu’on avait envie de faire découvrir. Fingerprint Records a été lancé officiellement le 16 juillet 2002. Depuis, nous avons signé Nobs, Dez, Atypical, Erosadis et DJ Gyro, sorti 12 albums et organisé 4 tournée d’une côte à l’autre des US. Nous vivons le grand moment de notre vie, retrouve-nous sur www.fingerprint-records.com.

Ca représente quoi le public de Fingerprint aujourd’hui ? C’est quelque chose que tu peux évaluer ?

Notre public croît, ça c’est sûr. On tourne sans arrêt pour assurer la promotion de nos disques. Nous sommes distribués aux Etats-Unis, au Canada, au Japon et en Europe. Je sais que notre musique arrive jusque là et qu’elle y intéresse des gens. Mais je ne pense pas être capable d’évaluer ce que ça représente. Ma meilleure arme, c’est le bouche-à-oreille, c’est tout ce que je peux te dire.

Tu peux nous parler de cette dernière sortie Fingerprint, je parle du nouvel album de Nobs et de Dez ?

Oui, c’est un projet qu’on voulait sortir depuis longtemps, produit par Nobs et écrit par Dez. Le nom de l’album, c’est Behemoth, et c'est tout fait à propos. C’est un disque agressif, sans concession et brut. Dez, qui est natif d’Albany, nous a rejoints cette année et je suis très content de l’avoir parmi nous. C’est un des plus grands bosseurs que je connaisse, tu peux le répéter ! Quand les gens vont découvrir Behemoth, ils vont voir ce que ça donne quand un producteur et un MC collaborent sans raccord. Behemoth est disponible sur www.fingerprint-records.com.

Nobs est l’un des artistes clés de Fingerprint. Mais je crois me rappeler que son premier album, Musicide, était sorti sur 3 Sides of a Circle, le label de Brad Hamers. Comment s’est-il retrouvé sur Fingerprint ?

Oui. Brad a sorti son premier CD sur 3 Sides. Pour aller vite, Nobs a contacté Losaka après avoir lu une critique de son album, Los m’a fait passer sa musique et les infos qui allaient avec, je l’ai contacté et nous avons organisé une rencontre. On s’est retrouvés sur plein de points, notamment sur nos projets, et on appréciait sa musique. Nobs est un autre bosseur, et en plus c’est comme un frère, c’est une sorte de petit frère un peu dingue et super talentueux.

Une tournée en Europe est-elle envisageable tôt ou tard ?

J’aimerais te dire tôt plutôt que tard. On a déjà travaillé dessus. Mais c’est beaucoup plus compliqué de planifier une tournée en Europe qu’aux US, pour des raisons évidentes. Il faut bien préparer son trajet pour optimiser le temps passé dans chaque endroit, et puis il faut enrichir son carnet d’adresses là-bas. Ca prend du temps. Je vais insister sur quelque chose : s’il y a des gens là-bas qui tiennent vraiment à nous voir, qu’ils en parlent aux promoteurs et aux clubs de leurs villes, qu’ils s’assurent qu’il y ait d’autres gens qui ont envie de nous voir. On a vraiment besoin de fans proactifs qui fassent monter le buzz pour aller plus vite. On apprécie les échos favorables qui nous parviennent d’Europe et on aimerait vraiment avoir l’occasion d’y faire un show. Si quelqu’un est intéressé par moi ou qui que ce soit chez Fingerprint, qu’il contacte Booking@fingerprint-records.com.

Un message particulier à la France et aux Français ?

(NDLR : si quelqu’un parvient à décrypter la totalité de cette traduction automatique, je suis preneur)

Merci tout de prendre le temps de donner lecture cette revue. J'apprécie tous les appuis ! Si vous n'avez pas acheté une copie de Karma Kingdom la commander ici : http://www.fingerprint-records.com.

Vous voir tout bientôt !

Je devine qu'ayant une amie française payed par le passé au loin !

Oh, et puis jetez une oreille sur Claude Debois, ce qu’il fait est frais, "Ville" est l’une des mes chanson préférées…