Une compilation rap indé au doux parfum de la fin des 90's, comme il en sort des dizaines par mois ces temps-ci. Souhaitons toutefois au label Boiling Point de ne pas disparaître, comme ces néandertaliens qu'il s'est choisi comme représentants, même si c'est loin d'être gagné...

Boiling Point :: 2002 :: acheter ce disque

Les compilations n'ont rien de rare dans le monde de plus en plus éclaté du hip hop "indépendant". Ce serait même limite le trop-plein. Pour chaque label en place ou émergent, l'exercice compilatoire semble le passage obligé, l'étape indispensable vers... Vers quoi au fait ?

Il fut un temps où le rôle des compilations était clair : faire découvrir, que ce soit par prospective ou par exploration du passé, des artistes unis par un lieu, un genre, un thème, une approche, ou quoi que ce soit d'autre de pertinent et de percutant. Mais à mesure qu'elles se mutliplient, celles-ci semblent perdre leur direction artistique et ne plus se résumer qu'à un bête objet promotionnel, à la concrétisation sur disque d'un gros carnet d'adresse censé crédibiliser tel ou tel label.

Sortie l'an dernier, la compilation Boom Bap for Neanderthals en est l'exemple patent. Pour Boiling Point, l'objectif apparent est de donner un coup de projecteur sur ses propres artistes. Ces derniers cependant (la Extended Famm, les Single Minded Pros) sont très faiblement représentés, en plus de ne pas être franchement convaincants. Pour le reste, la compilation est squattée par des figures assez établies pour qui suit un peu ces scènes hip hop (Vast Aire et ses collègues de la Atoms Fam, RJD2, Yaggfu Front et leur compère Esau, Xtracts of Slang, les CunninLynguists), par quelques protégés de hiphopinfinity (Genelec & Memphis Reigns, Mac Lethal) ou par des professionnels de l'entrisme et du net marketing (iCON the Mic King, Kenneth Master, Supastition). Et bien entendu, peu de morceaux ici présents sont des inédits.

Bref, on se demande où est l'intérêt de la démarche, d'autant plus que beaucoup de titres font preuve d'un académisme assez marqué, tout particulièrement sur les premières plages. Il faut attendre qu'un bon tiers du disque s'écoule pour enfin entendre les quelques passages qui sauvent l'ensemble. Ca n'est qu'avec le "The B-Boy Song" de J.A.Q. (une chanson pour b.boy, oui, c'est clair, on fait ce qu'on peut) que le niveau commence timidement à s'élever, pour s'établir à une altitude raisonnable sur les plages suivantes : le fort fréquentable "Sunwheel" de Genelec & Memphis Reigns (quifigure déjà sur l'album Scorpion Circles) ; le réussi "Greener Grass" de l'inégal iCON the Mic King ; un "Listen" qu'Esau concourt seul à rendre intéressant ; le "Law and Order" produit par RJD2, entre moyen et pas trop mal, comme d'habitude ; le "Karma" des CunninLynguists ; le "Trippin Dominoes" de Vast Aire.

Sur la longueur, Boom Bap for Neanderthals est une compilation honorable. C'est juste qu'elle ne sert pas à grand chose. Et surtout pas à attirer l'attention sur les artistes Boiling Point, pas franchement mémorables sur ce disque. Sans compter ce petit parfum suranné, ce petit air de rap réchauffé qui accompagne la compilation tout du long, comme si elle était sortie, non pas en 2002, mais vers 1999/2000. Souhaitons à Boiling Point qu'il ne s'agisse pas d'un mauvais présage, que le label ne disparaisse pas comme ces néandertaliens qu'il choisit comme représentants, faute de s'adapater aux mouvements de son temps.