The Downfall Of Ibliys souffre et souffrira immanquablement de la comparaison avec Operation Doomsday. Mais l'album de MF Grimm n'avait pas la même vocation, il n'est pas une compilation ravageuse de singles issus d'une période glorieuse. Il repose sur l'intention simple de raconter une histoire. Rien que parce que l'auteur y est parvenu, et en dépit de moments d'ennuis, le disque est appréciable.

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Plus de dix ans que MF Grimm est dans le paysage. Dix années bien remplies au cours desquelles il aura collaboré avec Kool G Rap, KMD et Kurious Jorge (sous le nom de Grim Reaper), participé à la grande épopée Fondle'em et finalement fait équipe avec Zev Luv X / MF Doom sur Operation Doomsday et sur le split EP MF. Ces dix années ont été tellement longues et riches que nous avions fini par oublier d'attendre ce premier album. C'est quasiment par surprise que vient donc nous cueillir cette année The Downfall Of Ibliys, un album concept (un "opéra du ghetto", selon le sous-titre) dont le personnage principal est un ange déchu réincarné sous les traits de MF Grimm.

Difficile, avant même d'écouter l'album, de ne pas le comparer au chef d'oeuvre de l'autre MF, Operation Doomsday. MF Doom ne rappe que sur deux des titres, mais il produit une bonne partie du disque sous le nom de Metal Fingers et sa présence se ressent fortement par endroits. Elle est d'autant plus flagrante qu'il reprend ses anciennes instrus à deux reprises : celle de "Foolish" (un titre peu captivant où les deux compères sont épaulés par Megalon des Monster Island Czars) reprend un extrait de Special Herbs, tandis que "Life and Death" (un morceau où la vie et la mort prennent chacune le visage d'une amante) prouve que l'instru de "Black Bastards !" (un des titres de... Black Bastards) est franchement increvable.

Le reste de l'album relève cependant d'un univers plus personnel, la plupart des productions (assurées également par Count Bass-D, Dr. Butcher, DJ Eli, Protest et Dminor) collant davantage à l'histoire relatée par MF Grimm et à sa voix basse et discrète. Ca fonctionne bien sur "Life and Space", le titre explicatif de l'album, produit par Doom. C'est charmant sur "Together", une histoire d'embrouille. C'est facile et plus entraînant que la moyenne du disque sur "Freedom" et "Howl" (deux prods de Dr. Butcher). C'est touchant quand MF Grimm qui purge actuellement une longue peine de prison s'inquiète de la fidélité de sa copine ("I.B's"). C'est souvent insipide par ailleurs. Et c'est absolument génial sur les deux parties de "Voices", un titre double (une partie MF Doom, une partie MF Grimm) sorti en catimini dont nous vous avions déjà parlé sur ces pages et qui, selon la formule archi-consacrée, légitime à elle seule l'acquisition de l'album.

The Downfall Of Ibliys souffre et souffrira immanquablement de la comparaison avec Operation Doomsday et avec l'époque Fondle'em. Mais l'album de MF Grimm n'est pas le même objet, il n'est pas la compilation ravageuse de singles issus d'une période glorieuse. Il repose sur l'intention simple de raconter une histoire et sur l'opportunité pour l'auteur de s'exprimer enfin sur long format. Rien que pour ça, rien que parce qu'il y est parvenu, et en dépit de moments d'ennuis, le disque est appréciable.