Tour à tour amusant, grinçant, entraînant, hilarant et touchant, Is n'est pourtant pas une bombe, mais un disque plaisant, franchement bien foutu, et largement aussi aguichant que son instigatrice.

Rapster Records :: 2001 :: acheter ce disque

Héritière d'une longue lignée d'égéries underground new-yorkaises à la mode madonne castratrice, Concetta Kirschner alias Princess Superstar a tout naturellement choisi le rap, genre dominant de nos jours et en ces lieux, comme moyen d'expression. Elle a aussi tiré profit d'un étonnant carnet d'adresses pour préparer ce quatrième album qui sort ces jours-ci. Successeur de Last of the Great 20th Century Composers, oeuvre déjà fort prisée où se bousculaient Prince Paul, John Forte et Jon Spencer, Princess Superstar Is tape en plein coeur de l'underground hip hop local et étale une guest list plus considérable encore. Ni plus ni moins que Bahamadia, J-Zone, The High & Mighty, Mista Sinista (X-Ecutioners), Mr. Len (Company Flow), Chops (Mountain Brothers) et l'increvable Kool Keith se pressent ici, auxquels s'ajoutent les anglais The Herbaliser et la chanteuse electro-folk Beth Orton.

Les grands messes de ce type ne sont pas toujours des garanties de succès. Mais la présence continuelle de la princesse au mic, le flow aigre et l'humour salace déjà présents sur le maxi Wet!Wet!Wet! offrent au tout un fil conducteur assez solide, que ne troublent aucun des intervenants, venus jouer ici leurs registres habituels : Kool Keith livre jusqu'il faut de répartie pornographique, J-Zone vient jouer les gigolos, et Eon, qui en deviendrait presque bon, prend le rôle du mauvais père, pendant que Princess Superstar, en mauvaise baby-sitter, se hâte de coucher les gosses pour s'envoyer en l'air.

Cette bitch de princesse enchaînant les saynettes explicites, le ton de Is est, globalement, le même que celui du maxi très coquin Wet!Wet!Wet!. Mais les beats, assurés par plusieurs producteurs, sont un ton au-dessus. D'un point de vue plus strictement musical, l'album est même riche de petites merveilles inventives et touchantes, comme "Bad Babysitter", "We Got Panache", "Untouchable Part. 2", "Welcome to My World" ou le junglisant "Who Writes your Lyrics".

Mais Princess Superstar ne s'interdit pas non plus un peu de sérieux et d'introspection sur "You Get Mad at Napster", ou quand d'autres femmes vienent l'accompagner : Beth Orton sur "Untouchable", et Bahamadia sur le magnifique "Too Much Weight", meilleur titre de l'album idéalement placé en fin de parcours, avant une réminiscence du beat de "You Get Mad at Napster", tout entier piqué chez Gainsbourg.

Sans avoir convoqué la crème de la production internationale, sans devoir grand chose à ses multiples invités et sans être née pour être MC, Princess Superstar s'en tire pourtant avec les honneurs. Tour à tour amusant, grinçant, entraînant, hilarant et touchant, Is n'est pas une bombe, mais un modèle d'équilibre devenu rare, un disque plaisant et franchement bien foutu, largement aussi aguichant que son instigatrice.