Ca fait déjà plusieurs semaines qu'est sorti A Bottle of Whup Ass, et je dois avouer qu'il m'a vraiment surpris. J'attendais des tas de choses d'artistes hip hop obscurs, mais pas de toi, jusqu'ici un parfait inconnu. Peux-tu juste nous dire qui tu es, et comment a commencé ta carrière dans le hip hop ?

J'ai toujours joué des instruments et collecté des disques depuis que je suis môme, mais ça ne fait que 8 ou 9 ans que j'ai vraiment commencé à faire des beats, du DJing et des textes, quand je suis devenu lycéen. Je faisais surtout de la production, mais je n'ai jamais trouvé qui que ce soit pour bosser avec moi. Etudiant, j'ai suivi des cours de musique et mon épreuve finale consistait à faire un album. J'en ai eu marre de distribuer mes enregistrements et de courir après tout le monde, si bien que je me suis mis à rapper sur l'album, par la force des choses je dois dire. J'ai finalement découvert Huggy Bear et Al-Shid (les MC's qui m'accompagnent) et quelques autres à mesure que le projet avançait, et je les ai mis dessus. Il est finalement sorti l'année dernière, sans que ce soit prévu. C'était mon premier EP, Music for tu Madre.

Je me suis efforcé de réunir quelques infos pour préparer cette interview, et j'ai pu lire que Vance Right (le DJ de Slick Rick) a été ton mentor en hip hop ? C'est exact ?

Tout à fait. Vance avait un studio à côté de mon lycée, et j'avais toujours adoré son boulot avec Rick. Je lui ai passé des démos et il m'a fait entré comme stagiaire. J'ai fini ingénieur du son. J'en voulais et j'étais le plus jeune ici, il m'a donc pris sous sa protection. J'avais fait de la musique avant de le rencontrer, mais il m'a appris les bases du métier d'ingénieur du son, et m'a fait produire d'autres artistes, me permettant de me faire la main.

Ta musique ne se résume pas au rap new-yorkais. C'est quelque chose de familier, mais qu'on ne peut classer ni East Coast, ni West Coast, ni quoi que ce soit d'autre. Quelles sont tes influences ?

Principalement le funk de la fin des 60's et du début des 70's. James Brown, les premiers Kool & the Gang, des trucs dingues de rare groove et des vieux 45 tours. C'est tellement direct. En ce qui concerne le rap, je dirais Public Enemy, NWA, Easy-E, EPMD, De La Soul, Marley Marl, 45 King... Tous ces trucs de l'âge d'or...

Tu es basé à New York : quelles sont tes connections avec la scène rap locale ?

Je n'en ai pas beaucoup. La scène locale ne me branche pas. Ils n'ont que des "je suis underground, je suis dans la marge, il faut sauver le hip hop" de merde à la bouche. Trop de politique, pas assez de musique. Le marché est saturé, aussi.

Ce qui m'impressionne vraiment sur ton EP, c'est qu'à part la participation de tes deux compères de Old Maid Ent., tu as tout pris en charge : la production, le DJing, le MCing. Où as-tu appris tout ça ? Comment t'arranges-tu avec ça, en particulier en concert ?

En concert, je me contente de rapper. Je fais tous les cuts et tous les beats pour mes albums, mais pour les shows, j'ai mon DJ, DJ Contakt, qui prend les choses en main. J'ai appris tout ça en étant un ermite. Si je n'avais pas fait de musique, ma vie aurait été ennuyeuse. Je me suis ennuyé à mourir plus jeune. A part pour la musique et pour les filles (ha ha), c'est dur de me faire sortir de chez moi. La plupart du temps, je suis chez moi à bosser sur mes oeuvres, alors autant essayer de faire trois choses à la fois.

Il y a deux autres très bons MC's sur ton album (ou EP, j'ai du mal à me décider). Huggy Bear (ressemble-t-il au Huggy de Starsky et Hutch ?) et Al-Shid. Quelle est la prochaine étape pour eux ?

Huggy ressemble à Pee Wee Herman version maquereau. Lui et Al-Shid ne sont pas signés parce que je ne veux lier personne à un contrat sur une longue période. J'essaie de les pousser et de les produire, et avec de les chance, de les faire reconnaître, parce que ne vais plus rapper très longtemps. Ils ont des trucs de prêt, mais les distributeurs ont peur de s'en occuper tant que je ne rappe pas dessus, parce qu'ils ne sont pas encore établis.

Et à propos de ton propre avenir ? J'ai lu que tu préparais un album. Ce sera quelque chose de complètement nouveau, une compilation de tes deux EP, ou quelque chose entre les deux ?

Une sorte de compilation. Peu de gens ont entendu mon Music for tu Madre, c'est pour ça que la moitié des morceaux seront une sorte de "best of"et l'autre moitié des inédits, mais ce sera un truc de la famille Old Maid. Je ne rapperai pas sur plus de la moitié de l'album, ça serait donc trompeur d'appeler ça un album de "J-Zone". Je vais tout de même tout produire. Il est possible que je produise d'autres artistes, mais je n'en suis pas encore sûr.

Finissons par les trois questions qu'un interviewer français pose toujours aux artistes américains. Tout d'abord, as-tu l'intention de venir en Europe ? Aura-t-on la chance d'assister à un concert de J-Zone ou d'Old Maid, dans un court ou moyen terme ?

Je suis censé venir en Europe en octobre. Mon promoteur travaille sur le circuit.

La plupart de nos comprapriotes ne comprennent pas les paroles en anglais : penses-tu que ça les empêche d'apprécier ta musique comme les Américains le font ?

Faux. Ils resentiront les beats, le flow et l'énergie, peut-être pas les textes cependant.

Troisième et dernière question : connais-tu le hip hop français ? Ma propre opinion est qu'il n'est pas aussi bon que certains le prétendent, mais parlons franchement.

Je n'ai pas entendu grand chose du rap français. Juste un français sur un titre avec des Américains.

Un message ou une conclusion pour finir cette interview ?

Les gens se prennent trop au sérieux. Amusez-vous. tout le monde s'en moque que vous rappiez depuis 1982. Tout le monde se moque de votre crédibilité hip hop, personne ne veut vous entendre parler de "wack MC's" à longueur d'album. Faîtes de la musique pour distraire. Achetez A Bottle of Whup Ass. Il y aura toujours vos copines et vos mères pour adorer.