75 Ark :: 2000 :: acheter ce disque

A première écoute, pourtant, A Much Better Tomorrow ne paie pas de mine. Les nombreux titres où apparaît Kool Keith (sous le pseudo, son 745ème au moins, de Sinister 6000), ressemblent à s’y méprendre à des chutes de studio de Dr. Octagon. Des titres dotés du même esprit, dans la même lignée, au son similaire, mais moins saillants, moins flagrants, moins percutants. Une impression de déjà entendu renforcée sur le très sombre "I Want da Mic", puisque le turntablist DJ Q-Bert, troisième larron de l’aventure, vient y poser ses cuts dévastateurs.

Puis, à la deuxième écoute, ou pour ceux qui avaient déjà entendu le EP, le charme de la production agit. Progressivement, tous les titres rappés dévoilent leurs charmes, et tout particulièrement le magnifique "It’s Over Now", composition lascive, douce et mélancolique, où Kool Keith incarne un artiste à la carrière sans lendemain. Mais aussi "King of New York" enlevé et tout en sirènes, le groovy "Cartoon Capers", son fond d’orgue et ses trompettes au refrain, le "I Want da Mic" déjà mentionné, et le très long titre introductif et conclusif "A Better Tomorrow", soutenu par le beat lourd et les technicités que The Automator partage avec quelques un de ses comparses, DJ Shadow en tête.

Car A Much Better Tomorrow reste avant tout l’œuvre d’un musicien. C’est d’ailleurs seul, sur des instrumentaux, que The Automator livre ses meilleurs morceaux : le cool "The Truth" (rien à voir avec le titre du même nom de Handsome Boy), la grosse basse et le saxophone de "4:17", où le producteur exploite avec succès une veine jazz qui ne lui est pas coutumière, et surtout, le splendide "Sleep". Construit comme d’autres sur un beat d’acier, lourd, lent, assommant, inexorable, à peine interrompu par des voix éthérées et quelques variantes incroyablement pertinentes, son violon généreux est l’argument décisif qui en fait une composition facile mais néanmoins marquante.

Sur un format court, et sans visées grandioses, Dan Nakamura peut donc être aussi convaincant que sur ses projets collectifs. Même si les puristes habituels prétendront comme à l’accoutumé que le producteur, plein d’idées à revendre mais en mal de subtilité (ce qui est juste), fait du trip hop. Possible, The Automator ne niant pas, bien au contraire, puiser ses influences dans d’autres sphères que celle du rap et des musiques noires. Mais qu’importe le genre et les racines de sa musique, A Much Better Tomorrow, fort de "It’s Over Now", de "Sleep" et de la plupart des autres, est un nouvel indispensable de sa discographie.