En 2008, Plies battait le fer tant qu'il était chaud. Suite au succès de The Real Testament, il sortait deux autres albums la même année, à commencer par Definition of Real. Et sur ce dernier, le rappeur de Fort Myers semblait mettre toutes les chances de son côté. Comme avec "Shawty", le single qui l'avait révélé, il nous mettait un coup d'Auto-Tune sur l'efficace "Watch Dis". Il forçait un peu plus sur les morceaux R&B formatés pour la radio, parmi lesquels le single qui deviendrait son plus grand tube, "Bust In Baby (Part. 2)", avec le chanteur Ne-Yo. Et il exposait ses rêves de succès sur le morceau final, un "#1 Fan" adressé à une fan fantasmée. Le Floridien parviendrait d'ailleurs à ses fins, cet album étant à ce jour celui qui s'est le plus vendu.

PLIES - Definition of Real

Plies, aussi, s'y faisait introspectif. Il se lamentait sur les malheurs des autres sur "Somebody Loves You", un titre au pathos accentué par un sample déchirant de Patti LaBelle. Tirant très ostensiblement sur la corde sensible, il pleurait un ami mort sur le réussi "1 Day", compatissant pour la mère et le fils qu'il laissait derrière lui. Et bien entendu, "Bust In Baby (Part. 2)" était une chanson d'amour, de même, dans un registre plus physique, que "Please Excuse My Hands". Cependant, Plies le voyou n'était jamais loin. Et avec lui, l'amour n'était pas toujours une affaire romantique. Sur "Feel Like Fuckin'" il ne perdait pas le sens des priorités : "d'abord le fric, après les chattes, et puis la bouffe". Tout cela n'était donc pas encore du rap pour les jeunes filles. Comme il le disait sur "Bust In Baby (Part. 2)", c'est d'abord à la rue que Plies était marié.

La priorité de Plies, c'était toujours de vanter son pédigrée de criminel. Et il n'y allait pas de main morte. Dès le premier titre, "I'm da Man", sur une production canon de Drumma Boy (et avec les doux refrains en trompe-l'œil de Trey Songz), le Floridien se posait en brute épaisse. Allant au bout de son personnage, il racontait sur "Ol Lady" comment se venger d'un débiteur, en lui piquant sa femme et lui faisant subir les pires outrages. Sur "Bushes", lui et ses hommes de main organisaient une embuscade pour trouer la peau d'un ennemi. Tous les expédients étaient bons, pourvu d'atteindre les rêves de richesse exposés sur "Rich Folk". Il cognait tant, s'offusquait une fois encore la portion rétrograde de la critique, qu'il en oubliait de bien rapper.

Avec ce rappeur-là, en effet, pas de rimes complexes, pas de subtilités d'écriture. Mais il serait faux, à l'instar de détracteurs qui peinaient à comprendre le nouveau paradigme du rap, de n'y trouver aucun style, ni aucune éloquence. Car quand Plies prétendait sortir du caniveau, sa manière de rapper décuplait le propos. De sa voix abîmée, avec sa texture râpeuse, avec ces mots énoncés de manière trainante, comme s'ils bataillaient pour sortir de sa gorge, le rappeur donnait du corps à sa musique. Malgré tout le grotesque de son personnage (ou plutôt grâce à lui), il en imposait quand il se faisait triomphateur et arrogant sur des titres tels que "Who Hotter Than Me", et quand il sortait la grosse artillerie sur "Shit Bag". C'est ce Plies-là, grossier et vindicatif, qu'on avait aimé sur The Real Testament, et que, en dépit de passages patchouli pas tous réussis, on se plaisait à retrouver une fois encore sur l'essentiel de Definition of Real.

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