Que fait Gucci Mane dès qu'il sort de prison ? Eh bien, naturellement, il nous offre une nouvelle mixtape. Bon, à vrai dire, il en propose aussi quand il est incarcéré, ses amis s'employant à distribuer les tonnes de morceaux qu'il enregistre à tire-larigot dans ses moments de liberté, pour s'assurer que le rappeur d'Atlanta reste au coeur de l'actualité. Mais celles qu'il propose après ses périodes de réclusion ont une saveur particulière. Elles permettent de vérifier si l'Homme Gucci est toujours animé du feu sacré, et si son style a évolué.

GUCCI MANE - Writing On The Wall

Cela s'est confirmé, par exemple, avec Writing On The Wall en mars 2009. Cette mixtape, en effet, a inauguré une nouvelle phase pour le rappeur, la plus riche de sa carrière, celle où, dans les années 2009 et 2010, il a sorti quelques-uns de ses meilleurs projets et approché de près le succès public.

Passons vite sur les défauts de cette sortie. Ils sont attendus, et acceptés par tout fan de Gucci Mane : Writing On The Wall est trop longue, plusieurs de ses morceaux sont superflus. Elle est aussi parasitée par les cris de DJ Holiday, qui beugle son insupportable "holiday season" toutes les trente secondes, faisant subir un faux départ à plusieurs titres.

Concentrons-nous plutôt sur l'essentiel, attardons-nous sur ses points forts, les mêmes que d'habitude : d'irrésistibles mélodies synthétiques et naïves, comme sorties d'un disque pour enfants ou d'un jeu vidéo préhistorique ("Hurry", "Going In", "First Day Out", "She Gotta Friend", "We Got Dat") ; ou au contraire, de grandes nappes tournoyantes ("Wasted") ; et puis ce rap simple et mécanique, rythmé ici ou là par les "yeah" et les "burr" coutumiers du bonhomme.

Les thèmes de la mixtape, eux aussi, sont attendus. Ou plutôt, devrions-nous écrire, le thème unique de la mixtape.

Ici, en effet, Gucci Mane ne parle que d'une chose : sa panoplie de bijoux. On l'entend les vanter, déclarer son amour pour eux, et même les embrasser sur l'introductif "Hurry". Seules des allusions aux stupéfiants et des considérations pornographiques le détournent de sa passion pour ses montres, ses diamants et ses chaînes en or. Il pousse le matérialisme à son comble, disant sur "Game", comme tant d'autres après DJ Quik, que si ça ne fait pas de dollars, ça ne fait aucun sens. Il le fait avec un tel goût pour la formule, un tel sens de l'absurde, que ça en est irrésistiblement drôle.

Et puis il y a les tubes, comme "Wasted" avec Plies, un single "sex, drug & rap'n'roll", l'un des succès de Gucci Mane, qui sera recyclé quelques mois plus tard sur l'album The State vs. Radric Davis. Comme aussi le très mélodique "Game", avec Kourtney Money et OJ Da Juiceman, qui se distingue avec bonheur du reste de la mixtape grâce à ses cuivres ensoleillés et à ses tons quasi reggae, tout autant que "Perfect Diamonds" et "Pussy Rehab" avec leurs nappes atmosphériques, et l'exposé par le rappeur de ses fantasmes lesbiens sur "Girls Kissing Girls", en compagnie de Nicki Minaj.

C'est grâce à cela que Gucci Mane réussit son coup, et qu'il inaugure avec Writing On The Wall une nouvelle période faste. Quelles que soient ses évolutions de style, comme ce flow estimé parfois plus complexe et plus agile qu'autrefois (des évolutions tellement progressives et organiques qu'elles en sont à peine perceptibles), ce qui a toujours fait aimer Guwop, c'est au contraire sa constance, cette manière de décliner à l'infini, comme pour un produit de série, la formule gagnante inaugurée dès 2006 avec la mixtape Chicken Talk.

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