Bougaloo, c’est l’un des noms méconnus mis en valeur par la compilation Calderas Del Mind, une initiative commune des Floridiens de Botanica Del Jibaro et des Allemands du Mooncircle Project. Son titre proposé s'intitulait "Voyeur" et c’était le seul où l’on pouvait entendre quelques raps dans la langue de Goethe. Le morceau était notable et engageant avec son gimmick de piano et son violoncelle. Pourtant, il représentait bien mal l’album dont il est issu. Car celui-ci, Synonym, le troisième sorti à ce jour par ce membre du groupe Bettie's Blues, contient infiniment mieux. Produit principalement par Gordon, le beatmaker habituel de Bougaloo, mais aussi par Speck (des Floridiens de Cyne), Mr. Cooper (des Anglais de Mummy’s Fortuna Theatre Company) et Einz, ce disque est cette année-là l’une des meilleures choses venues d’Allemagne, un pays pourtant loin d’être négligeable musicalement parlant.

BOUGALOO - Synonym

A quelque instrumental halluciné près ("Days of Agony"), tout cela est du rap normal : une boucle, un beat et un type qui s’exprime par-dessus. Mais avec une petite tonalité électronique et un goût de la variation, du crescendo, du détail qui tue, que Bougaloo déclare avoir travaillés tout particulièrement, et qui font toute la différence. Dès son "Prolog" et ce rap calme qui va exploser dans un bref élan de cordes, il est clair que notre Allemand n'est pas le premier rappeur venu. L’impression est confirmée tout au long du disque par un nombre appréciable de temps forts, comme "We Are", sa guitare et le joli chant de Maria de Bettie's Blues, comme le violon et les chœurs étranges de "Felder der Wachsamen", et surtout le somptueux "Oasis" renforcé par le grain de voix très Tom Waits de Frame, issu lui aussi du groupe de Bougaloo.

Pour rester juste et nuancé, il faut tout de même relever quelques baisses de régime ici et là ("Hertztod"), des titres méditatifs superflus ("Steinerne Seele"), des cordes qui jouent un peu trop avec les effets ("Jedis"), une fin un peu mollassonne et bien sûr, pour la plupart d’entre nous, la barrière de la langue. Mais cela pèse bien peu. Avec Synonym, nous nous surprenons à aimer un disque rappé en allemand bien davantage que pour son seul côté exotique.

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