Et pourtant, rendons-nous à l'évidence, nous autres, qui y avons cru assez longtemps pour, ce jour encore, être les partenaires de cette nouvelle soirée Növö Hip Hop : c'était franchement pas bien. Rien, ce soir, n'était à mettre au crédit du rappeur. Peut-être quelques légers moments de frisson quand il s'est lancé dans ses titres les plus anciens, au premier rang desquels l'inaltérable "Imaginery Places". Mais sinon, rien qu'un son pourri et cacophonique, des allers-et-retours tue-l'amour entre le public et ses machines, des titres technoïdes dont un rap et un jeu de scène brouillons détruisent le semblant d'efficacité, des gesticulations incessantes et épuisantes, sans moment, sans ménagement, sans chorégraphie.

Cela devient même cruel quand Busdriver fait monter sur scène son compère Riddlore (celui-ci semble être de toutes les fêtes parisiennes ces jours ci), tant le contraste est saisissant. Celui-ci bouge moins, il reste planté devant le public, le regard jeté droit devant. Mais sa présence et son flow sont suffisants pour rendre ces deux minutes d'intervention cent fois plus passionnantes que tout le foin de notre ami le conducteur de bus. Car rien d'autre ce soir n'est venu lui sauver la mise, et surtout pas ces tout nouveaux titres criards et creux, parmi lesquels ce navrant "Me-Time", où le rappeur cherche à nous refaire le même coup qu'avec "Imaginary Places", en troquant cette fois la "Badinerie" de Bach contre la "Marche Turque" de Mozart. Malheureusement, le réchauffé, ça n'a jamais été très bon.

Car "Imaginary Places", tout de même, ça remonte à près de dix ans maintenant. Et au fait, qu'est-ce qu'il disait ton vieux t-shirt, Busdriver ? "Sorry, underground hip-hop happened ten years ago" ? Que l'underground hip-hop avait eu lieu une décennie avant qu'on ne le célèbre ? Oui, ça on le savait déjà. Mais ce que tu nous as confirmé ce soir, c'est qu'on pourrait tout aussi bien y remplacer les mots "underground hip hop" par "Busdriver". Ca n'en serait que plus pertinent.