Battle Axe / Chronowax :: 2003 :: acheter ce disque

C'est toujours, toujours, toujours le même problème avec les rappeurs. Ces mecs ne savent pas ce qu'est un album. Ils ignorent à quoi ça ressemble, sont incapables d'en pondre. Même les meilleurs. Et quand ils y arrivent, c'est par accident, c'est faute d'avoir eu l'occasion plus tôt, et c'est presque toujours sur des premiers disques. Les MCs ne sont que d'infernaux bavards incapables de se retenir et de se censurer, impuissants quand il s'agit de gérer et de filtrer les productions. Cela se vérifie aussi, et ô combien, avec les virtuoses du Project Blowed, pourtant le dessus du panier en matière de hip hop. Cela se confirme avec le co-fondateur même de la fameuse session d'open mic, Abstract Rude.

Car il faut bien l'avouer, car il faut bien garder la tête froide. Malgré d'occasionnels titres d'anthologie, même ce disque remarqué (à notre petite échelle) qu'a été P.A.I.N.T. (le premier album d'Ab disponible en France) contenait un sérieux contingent de remplissage. Seul l'audacieux Haïku d'Etat (le projet du MC avec Aceyalone et Mikah 9 de la Freestyle Fellowship) pourrait se targuer à la limite d'une construction pensée et cohérente. Le dernier album d'Ab Rude, un Showtyme franchement en demi-teinte, ne se distinguera donc pas de la discographie compliquée et hostile au tri sélectif du rappeur californien à la voix chaude et aux prouesses verbales.

Cet album est pourtant loin de ne contenir que des bouses. L'introductif "Stand & Deliver", par exemple, est un titre charmant et attachant. "Headcase" est étrange et fascinant à souhait. Dans le genre apologie de la quiétude avec une française qui parle au milieu, "Coolin" le fait. "Get ’Live" assurerait presque sur un dancefloor. Mais il y a aussi des exercices bounce ratés, des choeurs féminins gnangnans et du rap normal rasoir sur Showtyme. Qu’il chante (en bon projectblowdien) ou qu’il rappe dans tous les sens (en bon projectblowdien), Abstract Rude livre immanquablement la même proportion de titres sympas, de morceaux passables et de passages irritants : un tiers, un tiers, un tiers. Bref, c’est du rap, du bon rap de super MC inventif et tout et tout. Mais moi, le rap, ça ne me suffit pas.