Encore un qui vient de Halifax. Encore un qui fait de la poésie. Encore un qui sort un grand album. Kunga 219 fait partie du groupe The Goods, et a décidé, comme ça, de sortir un album solo, entouré de producteurs divers et variés (Buck 65, DJ Moves, Sixtoo…).

Goodnight Musics :: 2000 :: acheter ce disque

Autant lever le suspens dès le début : cet album est magique. On pourrait aisément le comparer au Vertex de Buck 65 pour ce qui est de l’ambiance générale et de son phrasé, c’est dire si c’est pas forcément joyeux. Tout comme Buck, les paroles sont plutôt hors du commun et très axées sur son introspection, ce qui ajoute à la qualité globale, et on se trouve vite happé par celle-ci.

Tout au long de Tharpa's Transcript, Kunga 219 suit sa route, aux frontières du hip hop, un hip hop en filigrane. La rythmique s'efface souvent, le sample n'est jamais ostentatoire, et seuls de nombreux scratches marquent le territoire. On trouve aussi beaucoup de spoken-word (voire de longs intermèdes parlés comme "94 ft"), ce qui est typique de la région, mais pas que. D'une voix plus grave que celle de Buck, souvent accompagné d'un pendant féminin, Kunga démontre qu’il peut rapper plus ou moins normalement ("Subtled Senses") et même se lancer dans un a cappella sportif relatant un match de basket (très proche de la thématique baseball sur Vertex, en un peu plus métaphorique tout de même).

Bien entendu, Tharpa's Transcript est un album qui se mérite, auquel il faut laisser le temps de rentrer de nos têtes et de progresser jusqu'au cerveau. Inutile de chercher un hit, un morceau qui se détache des autres, à part peut-être 'Fine Spirits'. Ca n'est qu'avec le temps que les ambiances indiennes de "Things of Beauty", les solos de piano et le tambourin de "Seasus", les violons de "Could it be Me", et finalement, les beats lourds et les cordes du magnifique "Blue & Orange", ne font leur terrible effet.

Pour résumer ce résumé, disons simplement que cet LP est un grand moment de poésie, de lyrisme et d’émotion. On ne s’en rend pas forcément bien compte lors de la première écoute, mais il suffit d’un peu d’attention pour en comprendre pleinement l’ampleur. Buck 65, personnage parmi les plus fascinants de la galaxie Anticon, n'était donc que le représentant le plus visible d'un nouveau rap, lent, paisible, étrange sans être outrancièrement expérimental, sans doute blanc, canadien et bien loin du ghetto, mais tout à fait passionnant... On attend avec impatience de voir quels autres trésors Halifax nous réserve.

Article rédigé avec Kevin "Blougou"