Au début des années 90, après un deuxième album, Paul's Boutique qui s'est vendu en-dessous des attentes, les Beastie Boys sont presque oubliés des médias. Cela n'entame pourtant pas leurs relations avec Capitol, qui leur permet de bâtir un nouveau label promis à un grand avenir, Grand Royal. Au même moment, ils construisent leur propre studio, à Los Angeles, et ils embauchent pour l'occasion leur menuisier, Mark Ramos-Nishita, qui devient leur clavier.

BEASTIE BOYS - Check Your Head

Moins carton que Licensed to Ill, moins culte que Paul's Boutique, ce Check your Head qui sort alors ne manque pourtant pas de morceaux accrocheurs, comme ce "Jimmy James" imparablement groovy et sa pluie de scratches, par exemple, ou ce "So Watcha Want" avec ses terribles guitares.

Ce disque marque aussi le retour des Beastie Boys aux instruments rock (guitares, basses, batteries), lesquels dotent nombre de leurs morceaux du charme funky rétro ("Funky Boss", "Live at P.J.'s") déjà présent sur Paul's Boutique, sans rompre pour autant avec l'énergie revigorante du rap old school ("Finger Lickin' Good", au milieu duquel surgit un long sample de Bob Dylan), ni avec les brailleries acnéiques du premier album (le formidable single "Pass the Mic").

L'un des atouts de Check your Head, c'est aussi la présence récurrente d'instrumentaux proposés par Mark Ramos-Nishita, promu ainsi au rang de quatrième Beastie Boy.

Des interludes ("Time Biz vs the Nuge", "the Blue Nun") ou petites perles rétro, navigant entre soul et easy listening, surprennent ainsi l'auditeur, de temps à autre : l'orgue coolissime et les percussions de "Lighten Up", le vocoder de "Something's got to Give", un "Pow" qui redécouvre le meilleur des musiques noires, le morceau final "Namasté", et surtout, le funk de "In 3's" ou le dialogue orgue / guitare de "Groove Holmes". Mark se permet aussi de chanter (lui ne rappe pas) sur "Mark on the Bus", annonçant ses futures œuvres solos.

Sur Check your Head, de fait, ce sont toutes les années 90 qui défilent à l'avance : le hardcore, la lo-fi, le rock fusion, la frénésie breakbeat anglaise, l'esprit slacker, le trip hop, le renouveau easy-listening. En 1992, les rappeurs ont oublié les Beastie Boys, mais leur passé punk et les saveurs hardcore de certains de leurs morceaux les relancent auprès du milieu rock alternatif, alors en pleine explosion commerciale.

Les singles "Jimmy James," "Pass the Mic" et "So Whatcha Want" sont des succès sur les college radios. Sans rencontrer encore un plein triomphe, cet album remet les Beastie Boys en selle, tant commercialement que du point de vue de la critique. Et c'est avec un Ill Communication jouissif et musicalement très proche de Check your Head que seront cueillis deux années plus tard les fruits de cette régénérescence.

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